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L’âme



                                                      de Madagascar







                 Interview de
                 Kilema








                 Artiste et Ambassadeur Culturel


                 Depuis bientôt 30 ans, Kilema a foulé les principales scènes   On commençait à fabriquer de petites guitares utilisant des
                 du monde au sein des fameux festivals WOMAD parrainés   freins de bicyclettes ou des fils de pêche comme corde. Ça a
                 par Peter Gabriel, le mythique Woodstock lors de son 25ème   marché ! Mon père jouait de la guitare, et ma mère chantait.
                 anniversaire aux États-Unis, en passant par le Japon, l’Australie,   Mes cinq frères aînés et moi faisions partie de la chorale de
                 la Nouvelle-Zélande, pratiquement toute l’Europe, Taiwan, la   notre Église quand j´avais 6 ans. À la maison, c´était toujours
                 Corée, les Émirats Arabes Unis etc...  Il a joué au Central Park   la fête !
                 de New-York et sa musique a reçu d’excellentes critiques, non
                 seulement  sur  le  plan  musical  mais  également  culturel  et   Malheureusement, à Madagascar on ne gagne pas sa vie aussi
                 social. Nous avons eu la chance de le rencontrer pendant le   facilement avec la musique. Nos parents nous encourageaient
                 Shark Taronalari Festival à Samarkand, Ouzbékistan.  à étudier. J´ai eu mon diplôme de baccalauréat avec mention
                                                                 et quitté mon Sud natal pour rejoindre la capitale et continuer
                 Q : Que veut dire Kilema, et pourquoi avez-vous choisi ce   mes études universitaires en anglais.
                 nom d’artiste ?                                 Et  là,  par  hasard,  j´ai  rencontré  un  ami  d´enfance  qui  me
                 C´est  le  nom  que  mes  parents  m´ont  donné.  Madagascar   disait :  « Kilema,  on  fait  du  casting  à  l´hôtel  Hilton.  Ils
                 étant une ancienne colonie française, on choisissait les noms   cherchent un chanteur si ça t´ intéresse. » J´y suis allé, j´ai
                 à partir d´un calendrier où tous les noms étaient en français :   fait le casting, on m´a embauché.
                 « Germain,  Marc,  Anselme,  Benjamin,  Ernest…»,  et  moi   Après trois ans de contrat et avec quelques argents en poche,
                 CLÉMENT. Pourtant, dans mon village, CLÉMENT n´était   j´ai décidé de faire mes bagages et de tenter ma chance en
                 pas facile à prononcer. C´était devenu KILEMA malgachisé.   Europe.
                 KILEMAAAAAA, où es-tu ? KILEMAAAAAA, va chercher
                 de l´eau au puits !                             J´arrive à Paris le 30 mars 1993. Lors d´une soirée dansante
                                                                 organisée par les Malagasy de Paris, j´y suis allé pour être en
                 Q : Pourriez-vous nous parler de votre parcours ?  contact avec mes compatriotes. Et là j´ai rencontré par hasard
                 La musique a commencé dans ma famille.          quelqu´un qui était venu vers moi car il m´a vu parler avec
                 Un  de  mes  frères  avait  un  groupe  d´orchestre,  et  chaque   presque tous les musiciens qui animaient la soirée. Il s´est
                 fin  de  semaine  ils  faisaient  leur  répétition  à  la  maison.   présenté avec un grand sourire en me demandant mon nom
                 Mais comme le groupe ne voulait pas qu´on touche à leurs   et si j’étais artiste.
                 instruments, mes copains du quartier et moi avions une idée.   Je lui ai répondu que oui, je suis chanteur, compositeur, je


                                                                            D I VA   -   I N T E R N AT I O N A L   D I P LO M AT
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