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RAPPORT DE SYNTHESE DU PROJET DECONSTRUIRE LA VIOLENCE PAR L’ART
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al. (1989) considèrent que l’imagination, non seulement une sommes intervenues par moments pour les accompagner
activité noble et majeure de la vie mentale, mais encore un durant leur exécution de l’activité.
moteur du développement de l’enfant. Notre posture prend source dans le modèle d’apprentis-
Ce qui est important à souligner est que le groupe des sage basée sur la notion d’étayage et de tuteur, dans lequel le
enfants qui n’a pas bien investi l’atelier de dessin, a bien ver- médiateur joue un rôle fondamental aussi bien dans la réali-
balisé au contraire au cours de l’atelier groupe de parole, en sation du travail que dans la gestion et la régulation émotion-
rapportant différentes expériences vécues lors du confine- nelle. Cela était palpable à travers notre posture corporelle,
ment, quel que soit positive ou négative. Tandis que le groupe nos mimiques et le renforcement positif par moment (par
des enfants qui a été inhibé dans les échanges verbaux exemple : applaudissement). A ce propos, Bruner (1983) disait
du groupe de parole, en rapportant des discours semblables que la notion d’étayage correspond à l’aide apportée par un
et stériles avec une répression des émotions ressenties, adulte expert à une autre personne moins experte afin de lui
a au contraire tout projeté dans l’activité du dessin libre. permettre d’accomplir une tâche qu’elle n’aurait pas pu effec-
Ces derniers ont produit des dessins hétérogènes au niveau tuer toute seule (cité par Colette et Joan, 2000).
du contenu et chargés émotionnellement. Sur le plan interprétatif, la majorité des dessins témoi-
gnerait d’une tendance chez les enfants à soit éviter complè-
1.12. Perplexités par rapport à l’adolescence tement l’abord de la thématique familiale, soit de la dessiner
en deuxième lieu. Nous avons noté l’absence de famille dans
Ce thème a été évoqué spontanément par les enfants, ce qui quelques dessins en tentant de la compenser en dessinant
témoigne de leur inquiétude par rapport à cette phase déve- un environnement, une nature, une rue, une maison…etc.
loppementale. Selon Perot (1965) « l’analyse de la composition de la
Leur productions écrites et orales illustrent des problé- famille donne des informations sur les relations entre ses
matiques en lien avec l’accès à l’adolescence tel le rema- membres, telles qu’elles sont interprétées par le sujet. L’omis-
niement identificatoire et la découverte de la sexualité (vi- sion d’un membre indique souvent un affect de rejet vis-à-vis
sualisation des films pornographiques), les transformations de cette personne » (cité par Colette & Joan, 2000, p.68).
physiologiques et les désirs. Les remaniements psychiques Nous remarquons l’absence de représentation de la fa-
ont été illustrés par des inquiétudes par rapport aux change- mille dans quelques dessins, alors que la consigne avait été
ments physiologiques. très bien comprise par les enfants. Cette difficulté à dessiner
Nous avons remarqué que l’adolescence est perçue une famille, pourrait indiquer selon Colette & Joan (2000) que
comme un terme inconnu et péjoratif par les enfants. Cette « la famille n’a pas encore acquis de signification symbolique
perception est plutôt sociale qui traduit la crainte des pa- pour l’enfant ».
rents, transmise par les élèves, par rapport à l’obéissance et En poursuivant, les dessins sont majoritairement placés
le besoin de s’affirmer. au centre un peu vers le haut ce qui pourrait être assimilés
Les témoignages ont relevé beaucoup de perplexité et à un type d’attachement insécure et rigide, surtout dans les
d’inquiétudes. Nous avons donc présenté cette période de relations interpersonnelles (Buck, 1948, cité par Colotte &
vie comme : Joan). Très peu de dessins sont placés à droite de la feuille
· Un passage nécessaire entre l’enfance et l’âge adulte ; ce qui évoqueraient l’élan vers l’environnement, vers l’action,
· Un phénomène normal et naturel se caractérisant par vers l’autre et vers le futur. Mais elle fait référence aussi à l’an-
des transformations physiologiques, psychologiques et so- goisse de la solitude et des pensées intimes.
ciales positives sauf exception ; Pour la plupart des auteurs, la taille indique l’importance
· Une véritable période de transition où l’équilibre cogni- de l’investissement du sujet et pour certains des traits de per-
tivo-émotionnel et psychologique peut être provisoirement sonnalité particuliers. Les grands dessins (exemple : dessin 2)
bouleversé ; sont assimilés à un manque de contrôle et à l’acting out, alors
· Durant cette phase de développement, la possibilité de que les petits dessins (exemple : dessin 3) renvoient à l’an-
ne pas partager le même point de vue avec les parents est xiété, la timidité et au repli sur soi-même avec constriction.
tout à fait normal et ne suscite aucune inquiétude ; Le tracé appuyé renvoyait aux personnes agressives,
· Avoir une vie sociale riche, la communication non vio- impulsives ou énergétiques selon Aubin (1970), cité par Kim
lente et l’expression positive des émotions sont les garants Chi (1989). Kim Chi (1989) mentionne aussi la pression du trait
d’une transition constructive. si elle est forte évoque une pression intérieure. Les lignes
· Les éventuelles modifications et transitions vécues droites et carrées signent d’agressivité et de colère.
lors de l’adolescence vont contribuer au développement de Nous remarquons des gommages dans quelques des-
l’identité et la singularité de l’intégrité psychique relative à la sins, l’enfant rapporte qu’il a gommé la mère suite à la solli-
personne. citation du psychologue, d’ailleurs, c’est observable dans le
dessin.
1.13. La famille : q uelles représentations ? Royer (1984) avance dans ce propos, le sentiment de per-
plexité, le mécontentement vis-à-vis de soi-même, le senti-
Au cours de la réalisation des dessins de famille, nous avons ment d’inaptitude se remarque par les corrections, les gestes
remarqué une grande implication et un investissement de d’effacer (cité par Colotte & Joan, p. 82). Reynolds (1978) sug-
la part des enfants. Il y a ceux qui ont été dans la rapidité, gère que le gommage indique l’ambivalence, le conflit ou en-
d’autres ayant pris un temps de latence élevé et marqué par core l’insécurité (cité par Colotte & Joan, p. 82).
des moments hésitations et d’autres de rebondissements. Les couleurs nous renseignent sur l’affectivité, l’intensi-
Pour atténuer des manifestations de frustration et la pré- té des couleurs relève d’une affectivité riche. Cependant, les
sence d’une crainte de l’échec chez quelques enfants, nous dessins présentés par les enfants sont pauvres au niveau du
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