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physiques de pleine nature. Les enseignants, recrutés sur profil, étaient des professionnels de la
montagne. Alors que penser des enseignants non spécialistes qui parfois se lancent dans
l’encadrement de ce type d'activités, même en collaboration ou en partenariat avec le milieu de la
montagne ?
Une autre question est celle du leadership dans l’encadrement des activités. L’intervenant extérieur
apporte son expertise, mais son intervention doit toujours se placer sous l’autorité et la
responsabilité du professeur d’EPS qui a programmé la séquence pédagogique. L’observation des
pratiques d’encadrement montre souvent un lien de subordination entre l’enseignant et
l’intervenant extérieur qualifié : il a pu être constaté que l’enseignant n’osait pas exprimer son
opinion sur la gestion d’un incident ou s’en remettait à la compétence technique de l’intervenant.
Celui‐ci est apte en effet à décider de la conduite à tenir pour réagir dans l’urgence à une situation
critique. Mais, hors cette circonstance exceptionnelle, la prise de décision doit être constamment
partagée pour confronter les points de vue et éviter les décisions dites absurdes où le leadership de
l’un et les non‐dits des autres débouchent parfois sur de graves erreurs dans les choix. Un autre cas
de figure est celui de l’affaire de Die, où l’ancienneté de l’enseignant, sa double qualité de professeur
et de guide de haute montagne créaient une situation déséquilibrée avec ses collègues ou avec
l’intervenant qui avait lui‐même été un de ses élèves. C’est en prenant des décisions collectivement,
comme on l’a vu par exemple dans les sections assurant la bi‐qualification, que l’on fait attention à la
force de l’habitude et au respect du cadre scolaire qui ne peut ouvrir à toutes les formes de pratique.
C’est d’ailleurs ce qui légitime l’intervention du chef d’établissement dans la phase finale de
validation des projets : c’est lui qui est le garant de ce cadre scolaire.
La mission a rencontré à Chamonix les responsables du système national d’observation de la sécurité
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en montagne (SNOSM) qui étudie l’accidentologie des domaines skiables. L’accidentologie apprend
que ce ne sont pas toujours les moins expérimentés en montagne qui ont le plus d'accidents. Même
si les élèves des établissements bi‐qualifiants sont encadrés par des professionnels, il convient de
s’interroger sur la pratique du ski hors‐piste par exemple. Les spécialistes du SNOSM réaffirment
l’obligation de moyens sécuritaires, au travers notamment de la question des protocoles de sécurité
dans les sports de nature, mais ils posent sans détour la question de l’intérêt de la pratique du hors‐
piste pour ces élèves ; ils ne dénient pas toute valeur éducative au hors‐piste, mais recommandent
alors prudence et diligence. La distance au danger est à réguler et repose sur des décisions humaines.
Plusieurs chefs d’établissement rencontrés par la mission se demandent pareillement s’il est
nécessaire de s’engager autant dans des espaces présentant des dangers. Est‐ce vraiment
indispensable pour atteindre les objectifs recherchés ? Ils sont persuadés que l’on peut baisser d’un
cran le niveau d’engagement, car l’activité se situe dans le cadre de l’école.
Enfin, on ne peut non plus sous‐estimer le comportement des élèves, même s’ils ont été
préalablement sensibilisés et initiés aux procédures de sécurité. L’enthousiasme de l’âge, l’effet de
groupe, l’adolescent qui cherche à tester et à éprouver ses limites peuvent induire des
comportements hasardeux ou à risques qu’il appartient aux encadrants d’anticiper et de maîtriser. La
mission a entendu les élèves affirmer leur prise de conscience des règles de sécurité dans la pratique
des APPN. Ils marquent cependant des différences dans leur propre comportement selon qu’ils
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Le SNOSM, basé à l’école nationale de ski et de l’alpinisme au sein de l’ENSM à Chamonix, est placé sous l’égide de la
direction des sports (ministère en charge des sports), de la direction de la défense et de la sécurité civiles (ministère de
l’intérieur) et de la direction générale de la gendarmerie nationale (ministère de la défense). Il recense par
l'intermédiaire des préfectures des départements de montagne les interventions réalisées par les services de sécurité
sur les domaines skiables alpins et nordiques des stations de sports d'hiver en période d'exploitation.
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