Page 63 - Correspondance coloniale
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Je sais, sans connaître, qui est ma mère. Je me suis attachée à ma
mère adoptive sans jamais faire de ses fils mes frères. Je n’ai
jamais reconnu mes cousins dispersés çà et là. Et qui puis-je
reconnaître comme père ?!
Mon estomac se noue, ma vessie lâche, je suis étourdi ?
Qui puis-je reconnaître comme père ?
De qui puis-je recevoir honneur et reconnaissance ?
Qui me transmettra son savoir, son pouvoir, son sacerdoce ?
Par défaut j’ai fait de vous mon père. Je réalise qu’en m’affiliant
à vous, j’ai perpétré vos actes. Me croyant fort, dominant,
devenant méprisant…
Je n’ai pas su regarder les fils de ma mère abusée. Combien de
fois son cœur a dû être déchiré de voir tous ses enfants venus de
partout s’ignorer sous son toit, tout en voulant partager son
affection.
Désastre…
Toute ma vie j’ai pensé à travers vous. J’avais peur des autres,
vous étiez mon repère.
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