Page 58 - Correspondance coloniale
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Vous avez gagné, je me suis cru semblable à vous. C’était la
condition pour être votre égal. Enfin c’est ce que j’ai fini par
croire...
Tout s’embrouille en moi, c’est un mélange duquel je n’arrive
plus à distinguer ce qui est de moi de ce qui m’a été insufflé. Je
regarde ma peau qui me semblait être de la mauvaise couleur et
mes cheveux, la mauvaise ondulation. C’était évident puisque
que je ne pouvais me parer des mêmes coiffures que vous.
Mais en fait, pourquoi devrais-je me parer de vos coiffures ?
Pourquoi ma chevelure devrait-elle s’adapter à vos coiffures. Il
me semble pourtant, que comme toute race j’avais des coiffures
adaptées à ma chevelure. Mais elles me semblent laides, trop
différentes des vôtres…
Mais pourquoi vos coiffures sont-elles devenues mes références
alors même que je n’ai pas vos cheveux. Pourquoi n’ai-je donc
pas vos cheveux ?
Mais pourquoi voulais-je avoir vos cheveux ? Votre couleur ?
Vos yeux ?
Tout s’embrouille, je n’arrive pas à discerner quoi de ma nature
ou de mon conditionnement dirige ma réflexion.
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