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PRÉAMBULE Les pratiques agricoles intensives et l’élevage industriel ont également un impact fort
sur la biodiversité et l’émergence de virus . Certains élevages en Europe, où l’on compte
370 millions d’animaux vivant en cage , sont des réacteurs à fabrication de maladies
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à forte virulence. On l’explique par l’homogénéité génétique des espèces : quand tous les
individus d’un même élevage ont un patrimoine génétique très semblable, ils résistent
moins aux épidémies et celles-ci se transmettent plus facilement. Le commerce mondialisé
de ces espèces et produits animaux achève de diffuser les virus à l’échelle du globe.
L’accélération très importante du commerce illégal des espèces sauvages favorise
également l’émergence et la transmission de virus. A priori, le Covid-19 s’inscrit dans
ce schéma avec le braconnage du pangolin dont les écailles sont conservées pour
leurs supposées vertus pharmaceutiques. Cet animal serait l’hôte intermédiaire entre
la chauve-souris, porteuse du virus, et les humains qui consomment du pangolin en
modifiant les contacts entre la faune sauvage et l’humain. Il existe un trafic considérable
avec des dizaines de milliers de pangolins capturés vivants dans des conditions désas-
treuses. Lorsqu’ils sont en contact avec des humains, on obtient un réacteur infectieux.
Par manque de précaution sanitaire, les agents pathogènes portés par les espèces
continuent à se transmettre. Si ces animaux sont exportés ou vendus, on élargit le
cercle de la maladie.
Nous vivons dans un monde où nous
empruntons à crédit sur les générations
futures : on consomme plus que ce qu’on
peut renouveler.
Pascal Boireau, Directeur de laboratoire
La pollution des sols contribue également à la destruction d’habitats naturels et peut
favoriser le développement d’épidémies. Le plastique, les intrants et les fertilisants
introduits dans les sols les épuisent et détruisent la biodiversité. D’après Philippe
Grandcolas, seulement 20% des fertilisants introduits dans le milieu naturel agricole
atteignent leur cible. 80% des fertilisants n’atteignent pas leur cible et dégradent les
sols. Plus généralement, les produits chimiques introduits dans l’agriculture dérèglent
les écosystèmes. À cet égard, l’exemple de la diffusion du virus de la rage en Inde est
parlant. Comme l’explique l’écologue Jean-François Guégan au sujet de la disparition
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des vautours en Inde, empoisonnés par l’anti-inflammatoire administré par les éle-
veurs aux bovins : « les vautours ne faisant plus ce travail d’équarrissage naturel, les
carcasses ont pourri sur les routes, les cours d’eau ont été contaminés, les chiens et
les rats ont pris la place laissée vacante par les vautours et ont propagé le virus de la rage.
Depuis, des dizaines de milliers de personnes en Inde en meurent chaque année ».
Les grandes métropoles sont malsaines
pour la santé humaine.
Philippe Grandcolas, Biologiste et entomologiste.
4 / CIWF France, 2018.
5 / « Coronavirus : en quoi la pandémie actuelle est-elle liée à l’environnement ? »,
entretien avec Jean-François Guégan, France Inter, 18 mars 2020.