Page 138 - ANGOISSE
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- Il demeure malgré tout encore un tout petit espoir, lâcha-t-il après un court
        instant de réflexion.
        - Alors il faut vraiment que tu m’expliques car personnellement je ne vois pas
        la trace de la moindre lumière.
        - C’est pourtant toi qui vient de m’y faire penser. Tu viens de rappeler le but
        visé par notre très cher ami de la défense, se fit-il grinçant. Il semble qu’il ait
        toutes les cartes entre les mains et que rien ne puisse stopper son projet fou.
        Sauf qu’il a un talon d’Achille.
        - J’aimerais alors vraiment bien le connaître.
        - Je pense que tu seras d’accord avec moi pour reconnaître que celui-ci aurait
        déjà  pu  prendre  le  pouvoir  sous  la  forme  d’un  putsch  militaire  sans  que
        personne ne dispose des moyens de s’y opposer.
        - Manifestement oui.
        -  Pour  comprendre  où  se  situe  son  talon  d’Achille,  il  suffit  de  se  poser  la
        question simple suivante : Pourquoi ? Et la réponse est tout aussi simple même
        si elle ne nous a pas sautée aux yeux jusqu’à présent. Il est fondamentalement
        légaliste.
        - Tu m’excuseras de te contredire mais comment peut-on à la fois être légaliste
        et désireux de prendre le pouvoir par la force militaire ?
        - C’est justement là où se situe son unique faiblesse. En apparence cela peut
        apparaître comme contradictoire mais notre ami qu’il le veuille ou non a été
        comme nous tous imprégné des valeurs républicaines depuis son enfance. En
        l’occurrence il veut prendre le pouvoir mais, et c’est ce mais qui fait toute la
        différence,  il  veut  agir  dans  ce  sens  dès  lors  que  l’opinion  publique  aura
        majoritairement vu en lui l’homme providentiel. En quelque sorte, il a besoin
        mentalement de recevoir l’aval du peuple pour cautionner son action.
        - OK, compris. Mais cela change quoi à la suite des événements ?
        -  Pour  l’instant  gagner  du  temps  et  c’est  déjà  beaucoup.  S’il  avait  pris  le
        pouvoir, nous ne serions bien évidemment plus aux postes que nous occupons
        actuellement. Grâce à ceux-ci nous possédons encore quelques leviers pour
        agir. Et il convient par conséquent de les actionner au plus vite avec l’idée force
        de  conserver en  permanence  à  l’esprit  que  désormais  notre objectif  est  la
        conquête de l’opinion publique.
        - Tu ne cesseras jamais de me surprendre.

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