Page 262 - efi

264
LA MAIN CACHEE · Paranoïa - entre réalité et
suppositions
Lorsque le leader soviétique Joseph Staline mourut en 1953, il fut
remplacé par Nikita Khrouchtchev. Ce dernier était considéré par
ses ennemis, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Union soviétique,
comme un homme rustre et grossier. Lors d’une célèbre réunion
des Nations Unies, il retira sa chaussure pour marteler son pupitre.
« Nous vous enterrerons ! » déclara-t-il une autre fois à l’Ouest,
6
sur un ton de bravade. Or à cette époque, deux millions d’habitants
de Berlin-Ouest se trouvaient derrière le « Rideau de Fer »,
encerclés par les armées soviétiques. Pour résister aux Russes,
l’Amérique n’avait d’autre solution que de brandir la menace d’une
offensive nucléaire, s’ils avançaient sur Berlin Ouest.
Les Américains disposant d’une grande supériorité en termes
d’armement nucléaire et en capacités logistiques, Khrouchtchev
devait trouver un moyen de contrer cette menace par une
manœuvre d’intimidation. Il décida donc de se lancer dans un jeu
du chat et de la souris, arguant que l’URSS « produisait des
missiles comme elle fabriquait des saucisses », alors qu’en réalité, il
savait parfaitement que son arsenal militaire était bien moins
perfectionné que celui des Américains. Et pourtant, ce coup de
7
bluff sema un véritable sentiment de paranoïa chez les Américains,
tant parmi la population civile qu’au sein du gouvernement. 8
Si l’Union soviétique désirait contrer efficacement la menace
américaine, elle devait trouver une base de lancement plus proche
que l’Europe. Cuba semblait être une bonne option, car son
dictateur venait d’être renversé par un jeune révolutionnaire
audacieux nommé Fidel Castro.
Les Soviétiques instaurèrent leur relation avec Castro de
manière progressive. (Castro avait tout d’abord été considéré
comme un héros par la majorité de l’opinion publique américaine.
photographier les sites de missiles. Cet avion fut abattu et son
pilote trouva la mort. À l’annonce de cette nouvelle, Robert
McNamara, le Secrétaire de la Défense, entendit cette nouvelle, il
blêmit et annonça : « Voici la guerre qui s’annonce… »
10
Alors que Kennedy et ses conseillers discutaient de la bonne
marche à suivre, ils reçurent une lettre de Khrouchtchev exigeant
de la part des États-Unis un engagement officiel de ne jamais
envahir Cuba. Il avait déjà envoyé une lettre comme celle-ci
auparavant, mais il y joignait une seconde exigence : le retrait des
missiles nucléaires américains de Turquie. Or, si les États-Unis
pouvaient éventuellement s’engager à ne jamais envahir Cuba,
retirer leurs missiles de Turquie était une concession risquant de
leur faire perdre toute crédibilité vis-à-vis de leurs alliés.
Le Président Kennedy se trouvait face à un terrible dilemme :
s’il se montrait trop conciliant, il encourageait les Soviétiques, et
s’il faisait preuve de trop de fermeté, il déclenchait une Troisième
Guerre Mondiale.
· Le dénouement
Cette nuit-là, Robert Kennedy, Procureur Général et frère du
Président, âgé de trente-cinq ans, rencontra secrètement
l’ambassadeur soviétique Anatoli Dobrynin. Il lui proposa un
accord incluant l’engagement américain de ne pas envahir Cuba,
ainsi que le retrait des missiles américains de Turquie, à condition
toutefois que cette manœuvre ne soit pas rendue publique. Il fit
11
comprendre à l’ambassadeur que si l’URSS n’acceptait pas cet La crise des missiles de Cuba
accord, les Américains démantèleraient l’arsenal de missiles installé
à Cuba. Il exerça toute sa force de persuasion pour le convaincre
que le temps était court : les Soviétiques devaient immédiatement
accepter les termes de cet accord, sous peine de voir se déclencher
une action militaire immédiate.
269 # 68254_efi-ab