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SIM'HA 191
186 Être content de son sort
de l’habituelle pointe de jalousie que l’on peut ressentir à la vue
se sent chanceux d’être épargné d’une telle « fortune ». Au lieu
Plus cet homme parle de ses « richesses », plus son interlocuteur
d’une telle envergure.
a eues à obtenir les ordonnances pour constituer une collection
il jubile à propos du prix de chacun d’eux, et des difficultés qu’il
lui a demandé de prendre tous ces remèdes pour rester en vie ;
médicaments. Il explique d’un ton enthousiaste que son médecin
présente fièrement un assortiment impressionnant de différents
Cet individu ouvre en grand son armoire à pharmacie et
à acquérir.
montrer à son visiteur la collection de grande valeur qu’il a réussi
En guise d’allégorie, Rav Lopian évoque un homme désireux de
les plus simples.
Le plus riche des hommes est celui dont les plaisirs sont
Matière à réflexion
D’après le Ramban, nous n’affirmons pas que les vertueux ont
nous a donné.
de la manière dont nous voyons et acceptons ce que Hachem
À la fin du Birkat HaMazon, nous disons « Dorché Hachem lo
pas de la quantité ou de la qualité de nos possessions, mais
mes besoins). » Le bonheur et la satisfaction ne dépendent
souffrances… »
aurait dû vous envoyer chez quelqu’un ayant enduré de réelles
Être pauvre signifie « manquer de ce dont on a besoin ». Si Au début, tout se passa très bien et les chevaux réussirent à sort, le sentiment de frustration leur est étranger. laquelle ils ne sont privés de rien. Puisqu’ils sont satisfaits de leur n’aspirent à aucune forme d’opulence, et que c’est la raison pour les luxes d’ici-bas. N
un homme désire quelque chose qu’il ne possède pas, il est progresser en dépit des chemins boueux. Malheureusement, dont vous tirerez profit toute votre vie. Quant
nécessiteux, quel que soit le montant de son compte en banque. au bout d’une heure de voyage, ils furent soudain ralentis par à l’ultime récompense éternelle, elle vous
En réalité, une personne prétendument riche souffre davantage la somptueuse calèche d’un noble se dirigeant dans la même attendra au Ciel.
que celle qui est pauvre, car ses ambitions et ses besoins sont bien direction. Le cocher guidait ses chevaux à un rythme paisible pour
plus importants. Les désirs du nanti et sa soif de prestige ne sont éviter d’indisposer son aristocratique passager par des secousses
jamais comblés, car la satisfaction d’une envie ne fait que mener à trop violentes. La route étant trop étroite pour le dépasser, les
la suivante, puis à celle d’après. Comment prétendre au bonheur ‘hassidim furent contraints de ralentir et de rester derrière lui. Na’houm Ich Gamzou était célèbre pour son adage : « Même
lorsque l’on est toujours en train de courir après le prochain plaisir L’un d’eux se tourna vers son compagnon et lui exprima son cela, c’est pour un bien ! » Quant à son disciple, Rabbi Akiva, il avait
éphémère ? inquiétude : à un tel rythme, ils n’arriveraient jamais à Miedzibuz l’habitude de déclarer : « Tout ce qui arrive est pour le bien. »
avant Chabbat. Peut-être devaient-ils retourner à l’auberge ?
Les pauvres aussi bien que les riches peuvent souffrir d’une Ces deux affirmations sont légèrement différentes. Na’houm Ich
existence misérable et emplie de frustrations. N’est véritablement « Non, affirma le second ‘hassid. Hachem a fait en sorte que ce Gamzou percevait tous les événements, bons et mauvais, sous un
aisé que l’individu ayant dompté ses désirs, et n’aspirant à rien noble nous ralentisse. C’est sûrement pour un bien. » angle strictement positif, attribuant nos doutes à notre perspective
d’autre que ce qu’il possède réellement. Il a tout, car il ne manque Ils suivirent donc la calèche du noble en gardant une distance limitée. Pour mieux saisir cette idée, imaginez un enfant qui hurle
littéralement de rien. respectueuse, tout en guettant du coin de l’œil la progression et se débat, sans réaliser que sa mère le nourrit pour son bien,
du soleil. Au bout de plusieurs heures de voyage à un rythme en dépit de ses protestations. Nous réagissons de manière tout
Un homme doit apprendre à se concentrer sur ses véritables
considérablement ralenti, ils arrivèrent sur un sentier entièrement à fait comparable. Bien souvent, en raison de notre entendement
besoins, non sur ce que les autres possèdent. Désirer les biens et
embouteillé de véhicules immobilisés. La carriole d’un paysan partiel, nous ne réalisons pas à quel point Hachem n’agit que dans
les compétences d’autrui mène inévitablement à l’insatisfaction.
s’était cassée en raison de sa charge trop lourde, et bloquait toute notre intérêt.
Ceux qui passent leur temps à regarder du coin de l’œil leurs
la circulation sur le chemin étroit. Il était absolument impossible
voisins et leurs collègues, ont toujours l’impression qu’il leur Rabbi Akiva avait une perspective différente. Selon lui, ce que
de se frayer un passage.
manque quelque chose. nous considérons comme une situation difficile finira par s’améliorer,
Le noble n’eut pas la patience d’attendre. Il ordonna brutalement
Une parabole célèbre relate l’histoire d’un pauvre tailleur de à tous les hommes valides de déplacer la carriole endommagée car Hachem en est à l’origine et nous l’envoie pour notre bien.
pierre, qui passait ses journées à effectuer un travail éreintant sur le bas-côté de la chaussée. Les paysans n’osèrent pas discuter L’on peut comparer cela à une opération chirurgicale, qui malgré
et fastidieux. Un jour, alors qu’il taillait péniblement les roches avec l’aristocrate et obtempérèrent à contrecœur. En peu de son caractère douloureux n’en reste pas moins nécessaire pour
d’une montagne, il entendit un grand brouhaha. Le roi et sa suite temps, la voie fut libre. recouvrer une parfaite santé. Même lorsque, sur le moment, la
passaient par là. conjoncture paraît sombre et inquiétante, Hachem n’a envers nous
La longue file de véhicules reprit sa route. Lors d’une bifurcation, que de bonnes intentions.
Le tailleur de pierres interrompit son travail et regarda les ‘hassidim furent ravis de voir la calèche du noble ainsi que
avec mélancolie le monarque, confortablement assis dans sa celles des autres, prendre le chemin s’éloignant de Miedzibuz. Ils
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