Page 190 - Les Misérables - Tome I - Fantine
P. 190
Tout cela était prononcé d’un accent humble, fier, désespéré et convaincu
qui donnait je ne sais quelle grandeur bizarre à cet étrange honnête homme.
– Nous verrons, fit M. Madeleine.
Et il lui tendit la main.
Javert recula, et dit d’un ton farouche :
– Pardon, monsieur le maire, mais cela ne doit pas être. Un maire ne
donne pas la main à un mouchard.
Il ajouta entre ses dents :
– Mouchard, oui ; du moment où j’ai mésusé de la police, je ne suis plus
qu’un mouchard.
Puis il salua profondément, et se dirigea vers la porte.
Là il se retourna, et, les yeux toujours baissés :
– Monsieur le maire, dit-il, je continuerai le service jusqu’à ce que je sois
remplacé.
Il sortit. M. Madeleine resta rêveur, écoutant ce pas ferme et assuré qui
s’éloignait sur le pavé du corridor.
183