Page 58 - Constant, Alphonse-Louis (1810-1875). Dogme et rituel de la haute magie (Nouv. éd.) par Eliphas Lévy. 1930.
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50 DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.
Nous n'avons pas sous les yeux cette page empor-
tée comme tant d'autres par le tourbillon révolu-
tionnaire, mais nous nous rappelons avec quelle
verve le trop célèbre rêveur déclamait contre
la poésie et contre les rêves il était effrayant de
vérité lorsqu'il représentait l'Ëtat chancelant et
dévoyé, prêt à trébucher dans le sang à la suite de
quelque joueur de guitare que l'extase de sa pro-
pre musique empêchera d'entendre les impréca-
tions, les sanglots et les râles Voilà, s'écriait-il, ce
que c'est que le gouvernement des poëtes! Puis,
s'échauffant pour son idée, comme'c'est l'ordinaire,
il arrivait à conclure que Néron était l'incarnation
la plus complète de la poésie élevée sur le trône
du monde. Brûler Rome aux sonsde la lyre et dra-
matiser ainsi la grande poésie de Virgile, n'était-ce
pas une colossaleet impériale et poétique fantai-
sie?Ala villedesCésars qu'il sacrifiait ainsi comme
un décor à la mise enscène de ses vers, Néron vou-
lait substituer une Rome nouvelle, toute dorée
et construite d'-unseul palais Oh si la grandeur
de l'audace et la témérité desrêves font le sublime
en poésie, Néron était, en effet, un grand poëte!
Maiscen'estni M. Proudhon, ni aucun des chefsdu
socialisme moderne, qui ont le droit del'en blâmer..