Page 44 - Lux in Nocte 13
P. 44
Les villages s’étendent à travers le continent en détruisant les forêts. En passant du
chaos à la civilisation, ils imposent un ordre autant social qu’économique (fig.13). Le bien
terrestre correspond à la démonstration de la puissance et de la victoire de la communauté
sur la barbarie, un peu comme la croix fut plantée par les premiers colons lointains. De la
même façon, les sépultures défient le temps : elles sont devenues monumentales et
collectives. Elles s’inscrivent dans les paysages au même titre qu’un relief naturel et en
récupèrent la permanence et l’ostentation. Une fois conquises, les contrées où l’on vit sont
aussi celles qui appartiennent désormais aux mêmes populations défuntes (fig.14).
Fig. 13. Les paysages se muent en sources vitales avec le Néolithique ; à ce titre, ils sont
sacralisés. Au rythme de l’extension des populations humaines, ils passent du chaos à la
civilisation selon des cérémonies de transformations profondes et radicales, comme les
explorateurs du Nouveau Monde plantaient d’abord la croix chrétienne en terres
inconnues. Le village, entouré de forêts hostiles, est un microcosme du monde possédé
et mis au service des populations qui y vivent : ses bâtiments intérieurs reproduisent
l’ordre imposé par l’homme à l’univers qui l’entoure (paysans en Indonésie, village
rubané reconstitué)
44