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Christine Adamo - Copyright NMS51GC
LA FORET
La forêt, c'est mon endroit que j'aime le plus. Quand je peux
pas l'avoir autour de moi parce que je suis pas assez souvent dans
les Ardennes, je l'ai dans ma tête qui, à force, doit être toute verte à
l'intérieur. Ou alors rouge-sang et jaune-soleil, pareil que les
feuilles caduques-qui-tombent-en-automne comme dit la maîtresse.
Ou bien marron-cadavre quand après, elles sentent bon le froid et le
mouillé et craquent sous les pieds.
A la maison de la Neuville-aux-Haies, le week-end, on est
juste au-dessus du ravin de l'ours qui s'appelle comme ça parce
qu'il y a méga-super-longtemps, il y avait des ours dans les
Ardennes, pareil que dans les Pyrénées maintenant. Mais les
hommes les ont tués vu qu'ils préfèrent avoir des routes plutôt que
des ours. Les gens se tuent quand même beaucoup plus souvent sur
la route en voiture que mangés par un ours. Et les carambolages-
au-moins-ça-fait-du-spectacle, les gens doivent penser.
Des fois je me dis que c'est dommage que je suis pas né plus
tôt. Je suis sûr que j'aurais pu apprivoiser un ours et le cacher. En
tout cas, le ravin de l'ours, même s’il est super-profond et méga-
large, je le connais par cœur vu que je suis toujours en train de
regarder les belettes ou les chevreuils ou les orvets ou les scarabées
qui roulent des boules de terre toute leur vie.
Bismuth, les insectes, lui, il s'en fiche. Il gobe une mouche
quand elle lui passe devant le museau et c'est tout. Mais les plus
gros à poils, genre lapin ou chevreuil, il aimerait bien les courser
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