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ENCOURIR ET RISQUE

        Au cœur de la forêt les semences des étamines laissent de
        marbre l’abeille solitaire E-polaine. Depuis qu’elle boude dans
        son   coin   de   ruche,   et   déclaré   par   l’avette   psy   de   service,
        dixième   étage,   à   droite   après   l’hexagonal,   sans   préambule
        déformé par un complexe Œdipe, la Reine lui fit savoir que le
        temps des biz-biz-biz était à son terme.
        E-polaine avait le cœur gros d’une belle abeille. Elle rêvait de
        partir avec le premier cavalier bourdon venu. Mais elle avait
        toute  conscience  qu’il  était  atteint  de  cafard redondant,  de
        spleen à chaque tour de Lune, et de vague à l’âme au premier
        cumulus qui broie du noir.
        Elle ne pourrait rester, ici, calfeutrée entre cire et gelée royale.
        Non, non. Autant partir en formation pour jouer du saxophone,
        ce qui était un peu hors propos et elle se demandait si ce
        n’était pas la moiteur de l’endroit qui lui tournait un tantinet la
        tête en délire.
        Il était temps de passer à autre chose. Elle commençait à avoir
        les abeilles (facile) et si elle ne voulait pas se prendre un pain
        (d’abeille), elle devait se bouger la propolis. E-polaine se savait
        condamnée en restant à butiner des mauvaises pensées.
        Elle s’envola au premier matin qui baillait entre brouillard et
        fumet   de   compost,   et   se   dirigea   vers   l’Abeille   Érudite,
        hermaphrodite,   suite   à   une   intoxication   à   la   fleur   nommée
        Tcher'nobyle. Elle/Il était de bons conseils comme à l’exemple
        de   l’éclairage   de   la   Reine   sur   l’architecture   de   la   Ruche
        actuelle avec une nouvelle ventilation révolutionnaire à hélices
        diphatiques.
        Ce jour-là, pas de bol de miel, il était absent. Une absence
        étrange,   tout   de   même.   Elle/il   était   dans   son   alcôve
        bibliothèque aux heures du matin jusqu’à miel-midi. Il n’était
        pas   né   dans   un   monde-abeilles   stéréotypé   et   il   avait   des
        habitudes ancrées comme le couvain.
        E-polaine,   inquiète,   se   posa   sur   le   rebord   de   l’alcôve.
        Effectivement, pas un brin de frôlement d’ailes. Quand, elle
        ressentit sur une forte brûlure sur son thorax. Hélas, trop tard
        pour   réagir,   un   citron   mal   luné  ce  matin  présentement,   de
        colère   juteusement   acide,   pressa   à   tout-va   ses   envies   de
        meurtres.
        E-polaine mortellement blessée agonisa quelques instants en
        ailes décroisées sur le feuillage linceul, parmi ses milliers de
        congénères, dont l’érudit.
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