Page 72 - test
P. 72

À EN PERDRE LA TÊTE

        Rien ne va plus. J’ai un océan de factures à payer. J’exagère.
        Oui, je sais. Rien n’est simple pour « ma petite entreprise ».
        J’ai   refroidi   un   trésorier   du   royaume,   l’année   passée.   Ses
        restes font partie de la composition de ma statue nommée : le
        nuancier des douleurs, inaugurée par le seigneur du territoire,
        amateur éclairé d’art… humanoïde. C’est particulier et rien à
        voir avec l’art de l’armure. Et je me ferai parjure si je devais
        changer de matériaux.

        N’empêche que cet amour à un coût et je dois faire des pieds
        et des mains (j’aime bien cette expression) aux équarrisseurs
        de   notre   royaume   pour   me   procurer   quelques   coquins
        détrousseurs, coupe-jarrets ou brigands condamnés dans une
        des geôles du pays.

        Je suis un peu nostalgique (et aussi parfois mélancolique) du
        temps où le droit de création n’avait pas de limite. Nous étions
        dans un maelström de l’autopsie de l’art jusqu’à son épilepsie
        en compagnie du Bal des Dézingueurs. Et surtout la gratuité
        des matériaux. « On a beau faire, beau dire », quand le produit
        de production vaut une bouchée de pain, (voire gracieusement
        procurer) la vie de l’entrepreneur est moins laborieuse. Et sur
        ce point la Transnistrie a bien changé. Et la preuve j’en suis a
        produire, (et oui) un orphéon par mois, pour sortir la « tête
        hors d’eau ». J’en ai presque honte, mais comment éponger
        mes factures autrement ? Enfin, je ne suis pas le plus à…

        Tiens ? qui frappe à la porte ?

        A peine ouverte, mon regard à l’éclat de surprise quand d’un
        coup de sabre…ma tête roule sur mon seuil.

        — Enfin, un goinfreur en moins dans notre royaume et notre
        cher collègue vengé.
   67   68   69   70   71   72   73   74   75   76   77