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Tom Rice / L’unité du film colonial                          135

          ger. La rupture de la communication est telle que le COI écrit à John Grier-
         son, qui prévoit de se rendre en Afrique de l'Est en décembre 1949, pour
         lui demander de « faire un travail pour ce côté de la maison » en s'occupant
         des comptes des magasins de la CFU en Afrique de l'Est. Le représentant
         du COI a expliqué qu'il avait demandé les comptes à six reprises, mais qu'il
         n'avait reçu aucune réponse. Il conclut en demandant à Grierson : « Pour-
         riez-vous, s'il vous plaît, appliquer une fusée  » ?
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                   Lorsque l'unité fut fermée, les délégués menacèrent d'intenter
          une action en justice contre Howson et signèrent une longue pétition dans
          laquelle ils se plaignaient d'avoir subi « d’innombrables revers en ne béné-
         ficiant pas d'un soutien bien organisé et intelligent de l'Angleterre ». Ce-
         pendant, la fermeture acrimonieuse de l'unité est en grande partie le résultat
          de la restructuration de la CFU au sein du Colonial Office, un changement
          ironiquement défendu par les délégués est africains  . Le financement passe
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         désormais de Londres aux colonies, et si les gouvernements de la Gold
         Coast et du Nigeria assument les coûts de leur unité naissante, le gouver-
         nement est-africain n'est pas disposé à faire de même. Cette réorganisation
         a  eu  un certain nombre  de  répercussions,  comme  je l'ai suggéré.  Tout
         d'abord, les gouvernements coloniaux étaient désormais financièrement res-
         ponsables de la production cinématographique et le cinéma a donc été plus
         étroitement intégré à la politique des gouvernements locaux. Deuxième-
         ment, le Colonial Office était désormais en charge de la CFU, ce qui plaçait
         le cinéma plus en évidence au sein d'une administration coloniale britan-
         nique unique et centralisée. Ce paradoxe est au cœur du cinéma colonial
         des dernières années de l'empire, car la CFU est prise entre l'idéalisation de
         la centralisation et la tentative d'encourager la décentralisation.

                   S'exprimant en 1952 lors d'une conférence intitulée « New Di-
         rection in Documentary », le directeur du département de l'information du
         Colonial Office, C. Y. Carstairs, décrit le rôle modifié de la CFU. « Elle
         ne fait pas de films et ne donne pas d'ordres, commente-t-il,
            mais elle rend toute une série de services sans lesquels l'ensemble du cinéma
            colonial souffrirait certainement. Elle édite les films, s'occupe du titrage, du
            doublage sonore, du recrutement du personnel, de la commande du matériel et
            du stock, de la gestion du raw stock scheme » et de la formation ; elle recueille
            et diffuse des informations par le biais de ses trimestriels et parraine des re-
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            cherches  .
                   Ce modèle décentralisé favorisait encore les modes transnatio-
          naux de distribution et d'exposition, de personnel, d'idées, de stock et de
          matériel à travers l'empire. Cette approche suivait largement les suggestions
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