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Boukary Sawadogo / Défendre les études cinématographiques en Afrique 453
mentales et disciplinaires des membres du corps enseignant du cinéma afri-
cain, en particulier dans les universités nord-américaines. Dans son article
cité plus haut, Adejunmobi montre que la plupart des spécialistes du ci-
néma africain appartiennent à des départements de langues étrangères, de
littérature ou d'anglais et que peu d'entre eux sont basés dans des départe-
ments d'études des médias ou du cinéma.
Une autre façon d'analyser la marginalité des études cinématogra-
phiques africaines est de la comparer aux luttes d'une discipline naissante
dans son domaine. Par exemple, dans leur aperçu historique du développe-
ment des études cinématographiques en occident, Richard Rushton et
Gary Bettinson montrent comment les études cinématographiques ont
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fait leur entrée dans le monde universitaire dans les années 1960, non seu-
lement en démontrant leur crédibilité scientifique, mais aussi en profitant
des mouvements politiques et culturels anti-establishment des années 1960.
Les nombreux articles et monographies universitaires sur le cinéma africain
suffisent à justifier de ses lettres de noblesse. Peut-être que le dé-
veloppement des technologies numériques, des médias sociaux et des pla-
teformes en ligne gratuites pour la distribution de contenus audiovisuels
modifiera l'économie de l'image et la dynamique du pouvoir dans la circu-
lation des productions culturelles du Sud. Ces circonstances historiques et
contextuelles ont le potentiel d'amener les productions culturelles africaines
dans des lieux de distribution public. La visibilité et la réception populaire
qui en découlent pourraient se traduire par la création d'un plus grand
nombre d'études universitaires sur le cinéma africain.
Des sphères au grand public: encourager des études plus critiques
dans l'élaboration des études sur le cinéma africain
Études sur la formation des études cinématographiques africaines
La visibilité du domaine des études cinématographiques africaines
peut être réalisée en prenant des mesures concrètes pour produire et distri-
buer des connaissances critiques,( Boukary Sawadogo / In Defense of Afri-
can Film Studies 403) en créant des ressources pour les enseignants et les
étudiants, en organisant davantage de conférences ou de panels sur le ci-
néma africain, et surtout, en créant des départements académiques d'études
cinématographiques et médiatiques africaines dans les universités afri-
caines. Il existe déjà un corpus diversifié d'études sur le cinéma africain qui
a été produit par des chercheurs et des enseignants basés en Occident, de
sorte que des niveaux similaires ou plus élevés de publications savantes sur
le continent conduiraient à un domaine bien documenté. Les méthodes de

