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Samba Gadjigo & Jason Silverman / L’héritage de Sembène au FESPACO 517

à une séance de cinéma. Lorsque par hasard nous passions devant une affiche
de film, il ne s'arrêtait jamais. De plus, il refusait d'être photographié, tout
comme ma mère. Ce n'est que peu de temps avant sa mort que j'ai pu la photo-
graphier.
L'Afrique et les Africains sont présents dans de nombreux films : le pay-
sage africain comme arrière-plan et les indigènes comme artistes de foule. Les
ethnographes ont utilisé les commentaires des films pour établir la soi-disant
supériorité de leur civilisation. Ces africanistes ont menti à leur propre public,
mais si nous changeons les commentaires, les danses et les festivités resteront
authentiques pour nous, Africains.
En publiant ces textes recueillis à partir de sources diverses, nous ap-
portons notre pierre à l'édifice universel. C'est un signe de notre vitalité.
Cet acte commémoratif ne doit pas être une glorification de notre "pau-
vre" savoir-faire. Nous sommes encore loin d'atteindre notre but.
Notre cinéma est extraverti. Nous devons nous interroger sur nos la-
cunes, les imperfections de nos associations et de notre Fédération panafricaine
des cinéastes, la FEPACI. Nos productions cinématographiques ne sont pas pro-
jetées chez nous. C'est pourquoi, en tenant compte de l'exception culturelle, notre
combat est juste. Cette occasion qui nous donne l'opportunité de nous réunir
doit être consacrée à la réflexion. Notre continent, en proie à tant de problèmes
internes et externes, est plus vivant que jamais. Nous devons faire preuve d'au-
dace et reconquérir notre espace culturel et cinématographique. Défendre nos
pays, nos villages, nos maisons contre l'envahisseur est un acte d'héroïsme. Il
est encore plus noble d'avoir l'esprit assez fort pour combattre l'imposture et
l'iniquité chez soi.
Le XXIe siècle qui s'annonce est plein d'espoir pour nous, pour nos enfants
et petits-enfants. En cette année 1995 qui marque le Centenaire de la cinématogra-
phie, nous prenons le relais des cinéastes de la première génération.
Toutes les considérations de ce livre représentent un hommage sincère
à l'inventeur du cinématographe.
En Afrique, nous sommes enfin en train de sortir des films de pacotille
et nous sommes sur le point d'entrer dans la production cinématographique afri-
caine à grande échelle.
Merci à tous pour les aînés.
L'aîné des anciens
Ousmane Sembène
Ousmane Sembène était un cinéaste et auteur sénégalais
prolifique. Il est communément considéré comme le père du
cinéma africain.
notes :
Originally published as « Cinéma école du soir /Cinema as evening school », in FEPACI Présence Afri-
caine (Hrsg.): L'Afrique et le Centenaire du Cinéma /Africa and the Centenary of Cinema (Dakar: Pré-
sence Africaine, 1995), 9-14.