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Michael T. Martin, Samba Gadjigo & Jason Sylverman/ Solidarité médiatisée 579
SG : Et son projet, pas toujours compris, l’a isolé.
JS : Je pense qu’il y a une autre tristesse, plus grande, qui a commencé en
1960, alors qu’il y avait tant d’espoir pour l’avenir de la postindépendance.
Sembène a grandi à partir de ce moment et encore à la fin de 2004, quand il
a triomphé avec Moolaadé, qui était une fin pleine d’espoir, mais fausse. La
réalité est que le travail de l’expérience africaine est inachevé et lorsque nous
pouvons accepter cela et reconnaître que nous faisons tous de notre mieux pour
faire tout sur-place, alors vous ne pouvez que reconnaître la tristesse de ce mo-
ment.
MTM : Inachevé en termes de travail et de projet de Sembène, ou inachevé
dans le contexte des échecs des États africains dans la période post-indépen-
dance ?
SG : Cela aussi.
JS : L’échec des États en est un symptôme, je pense. L’espoir dans l’instant et la
réalisation de la liberté, mais que se passe-t-il dans le vide après la liberté ?
MTM : Ce qui me vient à l’esprit, c’est Queimada ! de Pontecorvo. [de Pon-
tecorvo lorsque, lors de la transition vers l’indépendance, la promesse de liberté
est trahie par la bourgeoisie locale et le capital étranger, ouvrant l’ère du néo-
colonialisme.
Photo 16. Sembène au bord de l'océan. Lieu inconnu. Capture d'écran par l'auteur

