Page 102 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE BIS
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Je m'étais très bien organisée dans cette petite chambre d'hôtel
que j'occupais provisoirement. C’était une adresse qui m'avait été
recommandée, et en l'absence de mes amis je consacrais mes soirées
à la lecture, plutôt que de m’aventurer dans un Paris inconnu.
A cette époque, la belle architecture de la capitale n'était pas
aussi resplendissante qu'aujourd'hui, les immeubles étaient sombres
et noircis par la pollution et les années. Les monuments historiques
n'étaient pas encore mis en valeur, je n’y prêtais donc pas grande
attention. Le métro me paraissait sinistre. C'était encore l'époque des
poinçonneurs de tickets, où nous passions un à un le tourniquet pour
nous rendre sur le quai. Les rames de métro étaient identiques à
celles que l'on aperçoit dans les films représentant Paris sous
l'occupation. Elles étaient constituées d’une première et seconde
classe. Les voitures de seconde classe, peintes en vert, les deux
voitures centrales de première classe, peintes en rouge. Les sièges
étaient tous en bois vernis, et l'arrivée de la rame de métro sur le
quai faisait un bruit infernal.
Nous étions début Janvier 1972 et le jour de mon arrivée chez
mon nouvel employeur me parut encore plus sinistre. Les bureaux
obscurs étaient entièrement recouverts de boiseries sombres, et les
employés semblaient tous froids et coincés. Je venais de me faire
engager chez un notaire, et en attendant de faire mes premiers pas
dans la haute-couture, je signais mon contrat d’employée comptable,
comme par hasard, chez "Maître Couturier »", Notaire au boulevard
Malesherbes, proche des adresses mythiques des grands noms de la
Haute-Couture ! Etait-ce un signe précurseur ?
Mais je n'en étais pas encore arrivée là...
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