Page 22 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
P. 22
LA CRÈME DESSERT
Cette malheureuse histoire de paie du légionnaire volatilisée dans l’égout
n’était pas du meilleur goût et la pauvre Mariette, responsable de sa tribu, avait
de quoi passer des nuits blanches.
En fait, après cette malheureuse histoire, il était dans la logique de penser
que cette mésaventure lui aurait été bénéfique et qu’elle resterait un peu plus
souvent chez elle, ne serait-ce que pour encadrer sa marmaille, mais également
surveiller les allers et venues de mon frère qui continuait à se rendre de façon
assidue chez elle. Pourtant, Mariette ne changea rien à ses habitudes.
C’est ainsi qu’un jour, à son insu, mon frère rentra chez elle, je
l’accompagnai. Avant de se rendre chez ses voisines pour commérages habituels,
Mariette avait confectionné une appétissante crème dessert encore tiède.
Une odeur agréable flottait dans toute la maisonnée. C’est alors que mon
frère eut une idée subtile. Il appela le cadet de la maison, après avoir goûté cette
délicieuse crème. Il lui ordonna d’exécuter un besoin pressant dans ce délicat
dessert, ce que le gamin fit sans hésitation, puis lui demanda toujours sur un ton
très impératif, de mélanger la mixture et de l’ingurgiter illico presto.
J’hallucinais, le gamin en question, se mit aussitôt à goûter ce dessert
revisité, sans manifester le moindre dégout, pour la plus grande joie de mon
frère, ravi de l’exécution de son cynique projet, déroulé sans la moindre
résistance. C’est un peu plus tard que mes parents apprirent comment le dessert
en question avait terminé, sans avoir eu le temps de refroidir complètement.
Mon frère fut puni évidemment, mais probablement pas assez
sévèrement puisqu’il n’en était pas arrivé à son dernier exploit.
21