Page 73 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE ET SES JOURS INTRANQUILLES_Neat
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LE BISTROT BRANCHÉ





                      Les choses avaient bien changé à mon retour dans le Nord, notamment
              l’ambiance du bistrot, sans oublier cette nouvelle chanteuse que Maman
              écoutait en boucle, prénommée Dalida, et je venais de la découvrir.

                      De plus, l’arrivée de quelques «Pieds Noirs» venus s’installer dans notre
              ville, suite à la guerre d’Algérie, allait quelque peu modifier nos habitudes

              alimentaires, en y apportant des spécialités de là-bas, ce qui n’était pas pour me
              déplaire. Le couscous et tous ces légumes du soleil je les appréciais

              particulièrement, nous allions le déguster chaque dimanche, à l’heure du
              déjeuner, chez un commerçant qui avait quitté cette Algérie à regrets pour

              venir s’installer dans le Nord, au bistrot situé au bout de la rue, face aux deux
              fermes, près de la route qui menait au Bois d’Halluin, actuel Parc du Lion, à la

              limite de la frontière belge.


                      Avec la nouvelle déco branchée du bistrot, un mobilier neuf en formica
              jaune et noir, un billard, un juke-box et un flipper, la clientèle habituelle du jeu
              de bourles semblait décalée et perturbée dans ce nouvel environnement. C’était

              une clientèle vieillissante qui n'avait pas suivi le cours de l'évolution de la vie,
              et avait fini par déserter le bistrot. Si mes parents s'inquiétaient de cette

              situation, mon frère s’en réjouissait et il allait la résoudre rapidement, puisqu'il
              contribua à un certain renouvellement de clientèle, avec l’arrivée de tous ses

              amis puis amis de ses amis.


                      Du jour au lendemain, nous étions passés de bistrot sombre et vieillot de
              quartier, avec sa clientèle d'habitués, à bistrot branché, constitué uniquement

              de jeunes empressés de se réunir dans notre bar pour et écouter la musique en
              vogue, influencée par le Golf Drouot. Ils écoutaient les chansons d’Elvis Presley,

              Johnny Hallyday, Les chaussettes noires avec Eddy Mitchell, Little Richard,
              Buddy Holly et bien d’autres. Rendez-vous était donné pour danser le twist
              dans l'arrière salle aménagée en dancing, où les couples se rapprochaient pour

              danser le slow sur les chansons de Richard Anthony. C’était le début de la
              période du Twist, des « Yé-Yé » et des « Blousons Noirs ».






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