Page 164 - La pratique spirituelle
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Dans le sommeil profond, la question de l’existence du                                              *
            corps ne se pose pas. Lorsque nous parlons du corps, nous                                             *  *
            ne parlons que de la représentation que le mental s’en fait.
            Lorsque le corps est écouté, la représentation mentale dispa-                Vous dites : « C’est la même lumière qui est présente dans l’in-
            raît. Ne restent que sensations, vibrations. Celles-ci ne peuvent            tention et la non-intention. Elle va ainsi se manifester tantôt
            être pensées. Elles sont objets d’observation, et ramènent inlas-            sous la forme d’une écoute du corps, tantôt sous la forme d’une
            sablement à la conscience qui perçoit. Il en est de même avec                observation des pensées, tantôt sous la forme d’une présence à
            les pensées, qui sont aussi objets d’observation, et ramènent                la présence. » Pour l’observation, peut-on, dans la même jour-
            inlassablement à la conscience qui perçoit.                                  née, écouter le corps, puis, observer les pensées, puis juste après,
                                                                                         la présence à la présence ? Peut-on faire cela à la suite ? N’est-ce
            Peut-on dire que s’il n’y avait pas la représentation mentale du             pas se disperser ? Que voulez-vous dire par « la présence à la pré-
            corps, il n’existerait pas ?                                                 sence » ? Est-ce penser à la présence ?
               On peut simplement parler d’une existence relative, en tant                  L’objet naît et meurt dans la conscience qui le perçoit.
            que perception.                                                              Dans les perspectives que nous explorons ici, la seule fonc-
                                                                                         tion de l’objet est celle de vous ramener à vous-même, pure
            S’il ne reste que la conscience seule, pour elle, le corps serait tout       conscience, pure présence. Que l’objet soit sensation ou pen-
            simplement elle-même, tout en n’étant pas elle, car en dehors                sée ne change rien à cette finalité. Il émerge en vous. Vous
            d’elle ?                                                                     en êtes le permanent support. C’est cette découverte de votre
               Du fait de l’unité de la conscience et de l’objet, il n’y a               identité originelle qui se cherche. La formulation de « présence
            jamais aucune division en vous, que ce soit à l’état de veille, de           à la présence » est une sorte de koan, compte tenu que la pré-
            sommeil ou de rêve. C’est le sens de séparation qui est remis                sence-sujet ne peut être objet pour elle-même. Elle est là pour
            en cause par la perspective unitive. Le dedans est le dehors, le             vous renvoyer à l’unité d’être, là où la division n’est pas. Elle
            dehors est le dedans. Dire que le corps existe ou qu’il n’existe             peut et doit être oubliée dès lors que s’est révélé ce vers quoi
            pas, sont deux affirmations opposées qui n’ont ni réalité, ni                elle pointe. C’est l’écho de la formulation qui doit être écouté,
            nécessité dans votre vécu indivis.                                           mais non la formulation elle-même.

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            Comment aborder les approches corporelles afin de favoriser la               La pensée ne peut pas se voir elle-même – tout comme le nuage
            désidentification au schéma corporel ?                                       dans le ciel ne peut pas se voir, il faut être à l’extérieur de lui
               La sensation est écoutée, globalement, totalement. Elle se                pour le voir. Donc, puisque la pensée est vue et qu’elle ne peut
            dévoile en vous, dans le silence de la conscience. Si on la suit             pas se voir elle-même, je me dis qu’il doit y avoir obligatoire-
            ainsi, depuis sa périphérie vers sa source, elle vous ramène                 ment quelque chose en dehors d’elle qui la voit !
            alors inlassablement à la vérité qui en est témoin.                             Absolument.




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