Page 211 - La pratique spirituelle
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C’est la non-pensée qui se réfléchit dans le mental en l’invitant   que perdure l’identification au contenu des projections.
 à se tourner vers elle, et non vers l’objet perçu. L’objet a été vu   Ce qui perçoit cet effort est en dehors de l’effort. Ne res-
 comme n’étant pas la réalité elle-même. Il perd donc de son   tez pas fixé sur le perçu, mais tournez le regard vers ce
 pouvoir d’attraction et de fascination. Le mental continue tou-  qui perçoit. L’effort disparaîtra de lui-même, en temps
 tefois à tourner en rond, cherchant un support à quoi s’accro-  voulu. »
 cher. Il peut créer en effet une image du Soi ou de la conscience
                                       *
 pure, et en faire un nouvel objet de dévotion. C’est toutefois le   *  *
 signe de sa fin proche car, tôt ou tard, il réalisera qu’il n’est pas
 possible de conceptualiser le sans-forme, sans créer une forme   Par quelle démarche répétitive ou introspective peut-on clari-
 de ce qui n’en a pas. L’effort est tout ce mouvement depuis la   fier notre perspective ?
 périphérie vers le centre. Le non-effort est ce qui règne lorsque   En revenant constamment au connaisseur du moi, il y
 l’attention est établie dans la non-localisation, qui transcende   a déplacement de l’attention depuis le moi, objet, vers la
 les notions de périphérie et de centre, de dedans et de dehors.   conscience, sujet. Vient un moment où l’objet apparaît inexis-
 L’effort est justifié tant qu’il y a identification au contenu de la   tant, dissous dans la conscience qui le contient.
 projection. Il s’éteint de lui-même lorsque la non-projection est   *
 habitée, tout comme le vent s’arrête lorsque l’œil du cyclone est   *  *
 habité. C’est l’effort qui vous quitte, et non vous qui le quittez.
            Je suis consciente de la nécessité de faire des efforts pour se déta-
 *          cher de l’ego. Mais il y a attachement à la finalité… il y a un
 *  *       espoir que l’effort soit récompensé ! Après l’effort vient le relâche-

 L’effort appartient au moi qui est une saisie. Peut-on alors par-  ment, puis la dépression, le sentiment d’échec…
 ler d’effort pour objectiver l’effort ?  L’instant lui-même est son propre but. Il n’y a pas d’autre
 L’effort est un mouvement pour aller quelque part. Ce qui   but. L’instant est le but. Il n’a, toutefois, ni début, ni fin.
 est conscient du mouvement est en dehors du mouvement. Le   Échappant à toute temporalité, il révèle l’intemporalité.
 rappel de cette conscience libre du mouvement est suffisant
 pour induire une désimplication.  Ne pas faire d’efforts semble sain. C’est le détachement, la
            liberté !
 *             Le désir de ne pas faire d’effort est encore un effort. Le non-
 *  *       effort concerne la conscience-témoin, qui, sans effort, témoigne
            du monde qui se déroule en elle. Lorsque la conscience prend
 « Pour mettre le pied dans une chaussure, un certain
 effort est nécessaire. Une fois que le pied et la chaussure   en charge le mouvement, le mouvement se fait par lui-même,
 sont un, il n’y a plus trace d’effort. Il en est de même   par sa propre intelligence. Il n’y a pas de lutte.
 avec l’attention. Un effort d’attention est nécessaire, tant




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