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LIBÉREZ VOTRE CERVEAU !
intéressera aussi bien les arts que les sciences, et l’on trouve,
déjà, dans certaines littératures des thèmes et des formes
neuroergonomiques.
Patrick Modiano, par exemple, fait référence dans ses romans à la
« méthode des lieux », qui est un moyen mnémotechnique ancien,
mais étudié aujourd’hui en neurosciences. De même, la conscience
qu’avait Proust de la subjectivité de sa mémoire associative et épi‑
sodique a fait dire à l’écrivain Jonah Lehrer que « Proust était un
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neuroscientifique ». La neuropsychologie va avoir un impact artis‑
tique majeur, comme elle l’a déjà démontré dans le cinéma, dans
l’op art, ou même dans l’informatique. Nous ne connaissons que
très peu les degrés de liberté, les rythmes et les proportions de notre
esprit, la neurométrique reste à inventer, mais ce qui est certain,
c’est que son développement ne nous sera bénéfique que s’il est
accompagné de sagesse.
Culture mentale
À l’image de nos muscles, notre cerveau dépérit dans la souf‑
france mais s’épanouit dans la contrainte – notre liberté consistant
à décider par nous‑ mêmes quand et comment nous la lui imposons.
Si les Grecs ont autrefois idéalisé le corps développé, nous pouvons
assainir notre système nerveux par la pratique de certains exercices.
Mens sana in corpore sano, c’est un idéal qu’il nous faut défendre,
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et que l’on poursuit par l’exercice de notre libre arbitre .
Pour le reste, la nature se charge d’éprouver le cerveau comme
elle l’a toujours fait. Ce sont d’ailleurs les épreuves qu’elle lui a
imposées qui sont à l’origine de sa forme et elle a été aussi dure
avec lui qu’elle le fut avec le corps. La pratique de la chasse à
l’endurance par nos ancêtres africains, une épreuve plus difficile
que le plus difficile des marathons, a permis de sélectionner, par
exemple, notre aptitude à la sudation. La nature a contraint tout
ce que nous sommes devenus : notre nutrition , nos interactions
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sociales, nos rythmes de veille et de sommeil, notre perception,
1. Lehrer, J., Proust Was a Neuroscientist, Houghton Mifflin Harcourt, 2008.
2. La différence conceptuelle entre le corps et l’esprit étant que nous ne pouvons
visualiser immédiatement un cerveau sain, alors qu’un idéal anatomique est représen‑
table en une seule image.
3. Notamment dans sa teneur, naturellement faible, en sucres raffinés.
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