Page 90 - J'aime autant te hair
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_ Quand nous avions onze ans Charles et moi, mon père nous
emmenait sur les montagnes, faire des campements et passer la nuit sous
la belle étoile. On le faisait chaque vacance. Un jour mon frère a trouvé un
chaton coincé entre des roches, blessé. Charles a tout de suite secouru la
bête, et moi qui ne voulait pas l’approcher courut le signaler à notre père.
Tu vas rire quand je te dirai que j’ai la phobie des animaux. Bref, Charles
a donc adopté ce matou qu’il bâtira plus tard César, avec l’approbation de
notre père.
Davis marque une pause, et pour la toute première fois, je remarque
que des larmes perlent au coin de ses yeux. Je ne sais pas comment réagir
face à ça. Mais il est décidé à poursuivre son récit.
_ A noël César avait attrapé la grippe ou une contagion de même
farine, il était de mauvais poil. Charles voulait le sauver à tout prix,
malgré les réprimandes de nos parents. Lui et son chat avaient déjà connu
trois longues années ensembles, c’est pour ainsi dire qu’ils étaient
attachés l’un à l’autre. Mon père avait su dans les moindres détails les
plans de mon frère, j’étais responsable de cette trahison et c’est peut-être à
cause de ça qu’il me déteste tant aujourd’hui. Charles avait déjà amassé
un peu d’argent dans la rue suite aux travaux forcés et il lui en manquait
beaucoup, donc la seule issue possible était de voler une somme
conséquente à mon père. Je crois en effet que mon frère voulait emmener
son chat chez un vétérinaire, l’idée n’était pas banale, mais notre père
n’avait pas formulé ce souhait. Il n’approuva pas le comportement de mon
frère. La nuit venue, je surpris mon père dans notre cour. Cet homme
venait de tuer César en l’étranglant, ensuite il le dépeça. Je fus surpris le
lendemain quand mon père nous annonça qu’il avait emmené le matou
chez un vétérinaire et qu’il rentrerait après noël. Charles était aux anges,
mais il ignorait que la nourriture qu’il avait dans l’assiette était en réalité
son ami César. J’avais trouvé ça bizarre, mon père avait tenu à ce que
mon frère ait un plat différent du nôtre. Mais à l’époque nous n’étions pas
en mesure de poser des questions. Ce n’est que plus tard que Charles va
surprendre une dispute entre nos parents et qu’il apprendra toute la vérité
concernant son chat.
Je ne pouvais le contenir plus longtemps. Mon vomi se répond sur
le sol. Davis me retient les cheveux. Après quelques spasmes intestinaux,
je respire enfin.
_ Il faut que je rentre maintenant, encore merci pour cet échange.
_ Tu devrais plutôt essayer de prendre l’air.
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