Page 176 - La mafia des generaux-Hichem Aboud _Classical
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La mafia des généraux

ment de révolte? Leur interrogatoire, dans les commissa·
riats de police ou dans les locaux de la Sécurité militaire,
ne portait pas sur les raisons de leur mécontentement. Les
éléments chargés de les auditionner devaient leur soutirer
les noms de leurs « manipulateurs ». Ce qui faisait dire à
un officier offusqué par ces procédures : « Même si l'on
tombait sur le manipulateur en personne, il fallait lui
demander qui le manipulait. »

      Cette obsession de la manipulation et du complot ne
s'explique pas seulement par l'aveuglement des hommes
du système qui refusent de voir la réalité telle qu'elle est.
Elle reflète parfaitement leur nature et leur niveau intellec-
tuel. Analphabètes et incapables de réfléchir, ils ne peuvent
imaginer un seul instant qu'il puisse y avoir des Algériens
capables de réfléchir, agir et réagir. Ils ne peuvent juger
les autres qu'à travers ce qu'ils sont.

      À tous les échelons du système, le premier critère que
doit remplir le candidat à une promotion, c'est de faire
montre de souplesse. Autrement dit, il faut être manipuw
lable, que ce soit pour un poste de ministre, waH, chef de
daira (sous-préfet), une candidature aux élections munici-
pales ou autre. Le manipulateur peut être le petit gendarme
du coin, le sergent exerçant au niveau du bureau de sécu-
rité du secteur militaire, le petit agent de recherche des
renseignements généraux de la police. Ce peut être aussi
un affairiste véreux, appuyé par un officier supérieur ou
proche d'un clan au pouvoir.

      Durant mes quatre années d'exercice à la Direction
de la Sécurité militaire, je n'ai jamais entendu parler de
l'existence d'un service de propagande ou d'un service
d'action psychologique qui ferait dans la manipulation des
foules ou mènerait des actions précises avec des objectifs
définis. Cette « terrible » Sécurité militaire, dont la seule
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