Page 239 - La mafia des generaux-Hichem Aboud _Classical
P. 239
Le temps des marionnettes 237
seurs. Le soir, en diffusant la conférence de presse, la télé-
vision algérienne avait tout bonnement passé aux ciseaux
les deux questions pour ne présenter que la moitié de la
réponse de la première. Le lendemain, je titrai à la une
d'El Acil : «Qui censure Kati?» Dans l'éditorial, je
demandais s'il y avait une autorité supérieure à celle du
chef de l'État pour se pennettre de le censurer.
Ali Kafi n'était pas facile à manipuler. Il connaissait
leur passé. Ils ont tout fait pour éviter l'affrontement avec
lui en attendant l'arrivée du prochain poulain.
Vivant paisiblement sa retraite dans sa ville natale de
Batna, le général Liamine Zeroual ne s'attendait nullement
à se retrouver un jour au sommet de l' État. Son élection
fut une supercherie sans pareille. Ce retour sur scène du
général en a surpris plus d'un. À commencer par l'inté-
ressé lui-même. "'-
Suspecté d'avoir « comploté »), en 1986, avec quatre
autres généraux pour éjecter Chadli en douceur de la prési-
dence de la République, Zeroual avait été envoyé comme
ambassadeur en Roumanie en 1989, au moment où ce pays
était coupé du reste du monde. De retour à Alger, après
neuf mois passés à Bucarest, il demande à Chadli un poste
d'ambassadeur dans un pays où il fait bon vivre. Le prési-
dent dégage en touche : « Va voir avec le ministre des
Affaires étrangères», Sid Ahmed Ghozali à l'époque.
Ce dernier savait très bien que, pour les généraux,
étrangers au corps de la diplomatie, sans recommandation
ou instruction du président de la République, aucune déci-
sion ne pouvait être prise. La demande de Zeroual est donc
tombée dans les oubliettes. Ce berbère aurèssien n'est pas
du genre à aimer les affrontements. Estimant avoir fait son
temps, il est parti mener une vie des plus ordinaires à
Batna, afin de s'occuper de ses affaires, loin du tumulte