Page 125 - ANGOISSE
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Pigastel, CHU -15 Juin – 07H12
Le Directeur tempêtait et profita du fait qu’il était seul, étant enfin parvenu
à convaincre son assistante qu’elle devait rentrer chez elle afin de se reposer
au moins quelques heures, pour lâcher quelques jurons bien sonores. Cela
faisait plus d’une heure qu’il tentait désespérément de joindre le cabinet du
Préfet sans qu’il n’arrive à obtenir autre chose que la sempiternelle annonce
que toutes les lignes étaient occupées. Malgré tous les efforts consentis par le
personnel du CHU, la situation était devenue totalement ingérable. La ricine
n’était désormais plus son unique préoccupation. Depuis la veille au soir ses
services avaient dû faire face à l’arrivée de nombreuses personnes blessées le
plus souvent par armes blanches. Depuis quelques coupures ou entailles plus
ou moins bénignes susceptibles d’être soignées dans un délai assez bref si leur
nombre n’était pas si nombreux jusqu’à la valse des ambulances, pompiers,
SAMU, venus déposer les brancards dans lesquels se trouvaient les plus
touchés lorsqu’il ne s’agissait pas d’une urgence vitale. La folie semblait
littéralement s’être emparée de toute l’agglomération et de la majorité de ses
habitants. Et il n’existait que peu d’espoir d’entrevoir une accalmie dans ce
sombre paysage. Plusieurs médecins libéraux, conscients de cette situation,
étaient venus proposer spontanément leurs services, ce dont il les avait
remerciés chaleureusement en acceptant sans rechigner leur assistance.
Malgré tout, l’effectif était très nettement insuffisant et ce d’autant qu’il
n’avait eu d’autre choix que d’instaurer un roulement du personnel afin que
celui-ci puisse alternativement se reposer. En dehors de cette insuffisance en
termes d’effectifs venait au surplus se greffer un problème matériel de taille,
le nombre de places disponibles ou plus exactement celles qui faisaient
cruellement défaut. Difficulté totalement insurmontable sans l’aide des
services de la Préfecture. Tous les services du CHU ainsi que les quatre
gymnases mis à sa disposition étaient entièrement saturés et il n’était
évidemment pas concevable dans son esprit de laisser des patients allongés
directement sur le sol si tant est d’ailleurs qu’il restât encore des espaces
disponibles. Il avait tenté vainement de retourner le problème dans tous les
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