Page 44 - ANGOISSE
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Le Président demeura pensif quelques instants. Au lieu de garder pour lui
        l’analyse rapide de la situation qu’il venait de faire, il préféra la partager afin
        de s’enrichir du point de vue de tous ses ministres.
        - Messieurs, nous sommes face à un véritable dilemme. Et je ne parle pas
        simplement de la prise en charge de tous les patients mais du constat que face
        à notre ignorance actuelle de l’origine exacte de cette affection notre rôle
        consiste  également  à  préserver tous ceux  qui  ne  présentent  encore  aucun
        symptôme.  Si  on  considère  qu’il  s’agit  bien  d’une  intoxication  alimentaire,
        nous sommes pour l’heure dans l’incapacité totale de savoir s’il s’agit d’une
        crise ponctuelle sans autres effets que ceux que nous subissons déjà ou bien
        s’il s’agit d’une crise chronique, endémique. Dans ce cas, je n’entrevois d’autre
        solution que de faire savoir aux Français qu’ils doivent strictement demeurer
        à jeun jusqu’à ce que l’on trouve la cause d’une telle intoxication.
        - Je pourrais parfaitement comprendre une telle décision sur un plan sanitaire,
        intervint le Ministre de l’économie et des finances, mais sachez que cela aurait
        une  répercussion  catastrophique  sur  tous  les  métiers  de  bouche.  Cela
        signifierait des supermarchés, des restaurants, des boulangeries totalement
        vides. Avec évidemment de lourdes pertes financières à la clé. De plus, durant
        une  période  que  nous  sommes  totalement  incapables  de  déterminer.  Cela
        durerait vingt-quatre heures, deux jours, huit jours, dix peut-être ? Autant dire
        qu’il s’agirait d’un sabordage de notre économie tout entière.
        - Tous les moyens, reprit le Ministre de la Santé, sont évidemment mis en
        œuvre de manière prioritaire pour identifier l’origine du mal et vous devez
        savoir que des autopsies ont été pratiquées afin de réaliser des prélèvements
        plus  complets.  Ceux-ci  sont  actuellement  entre  les  mains  de  nos  meilleurs
        biologistes.
        - Nous aurons les résultats quand ? Questionna aussitôt le Président.
        - Disons, que nous devrions avoir les premiers résultats en milieu d’après-midi.
        - Plus précisément, à partir de quelle heure ?
        - On ne peut pas raisonnablement les escompter avant dix-sept heures.
        - Qu’en pensent vos autres collègues, questionna le Président en s’adressant à
        ceux des Ministres qui n’avaient pas encore pris la parole.
           Ce fut Louis MAUREL qui intervint le premier.


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