Page 36 - L'Empreinte du temps
P. 36
Le cadre du Palais de Justice lui parut toujours aussi
impressionnant avec ses hauts plafonds et ses dalles de marbre blanc
qui recouvraient généreusement le sol. Pour quelqu’un de confronté
pour la première fois à l’appareil judiciaire ce devait être intimidant.
Ce qui d’une certaine manière était l’effet recherché. Donner
l’apparence de la grandeur, du pouvoir. De ce glaive qui pouvait
s’abattre à tout instant. Aussi bien sur les faibles que sur les puissants.
Clarice y avait également cru au départ, à l’équité de cette Justice
avant de se rendre très vite compte qu’il s’agissait bien trop souvent
d’une représentation généralement donnée en public, au public,
destinée à entretenir l’illusion. Un spectacle, une parodie au cours de
laquelle les juges assénaient des sermons qu’ils ne s’appliquaient
généralement pas à eux-mêmes. Ainsi à l’occasion de sa première
rencontre avec le premier substitut du Procureur de la République,
Monsieur BELLACEM, celui-ci lui avait fièrement montré le pistolet
Police Python 357 Magnum de 6 pouces dont il avait fait l’acquisition
tout à fait légalement mais dont le port et le transport lui étaient
normalement interdit de manière tout aussi légale. Sauf que
l’opportunité des poursuites revenait…à ses services. Ce constat avait
été le premier mais pas le dernier de sa courte carrière et elle avait
pris le parti de ne plus y attacher d’intérêt bien que cela bousculât sa
morale et son sens de l’équité. Tenter de braver la Justice consistait
à se tirer, ni plus ni moins, qu’une balle dans le pied. Et elle n’était
pas prête à vivre ce genre d’expérience douloureuse.
C’était la seconde fois qu’elle retrouvait cette Juge d’Instruction.
Et toujours avec le même plaisir. La magistrate lui avait parue
d’emblée sympathique, avenante, à l’écoute. Tout le contraire des
clichés que l’on peut souvent avoir sur le sujet. Ceci étant sans doute
en partie dû au fait que Clarice devait avoir sensiblement le même
36