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Opposition de champs lexicaux

          Au lieu d’associer les réseaux (cf. feu et amour), l’auteur peut les opposer afin de créer une tension
          révélatrice des luttes et conflits présentés dans le texte (voir exemple ci-après : « Le Dormeur du val ».
          D’autre part, l’auteur peut aussi utiliser un champ lexical éloigné de ce qu’il décrit en vue de produire
          un effet poétique : c’est ainsi qu’il est fréquent de décrire le gel en utilisant le vocabulaire de la lustrerie
          ou le mouvement des vagues en utilisant le lexique de l’équitation.

          Ainsi, dans l’extrait du « Dormeur du val » ci-dessous, deux champs lexicaux s’opposent et s’entrecroisent :
          –  celui de la nature rayonnante, pleine de vie,
          –  celui de la mort.



                                    « Le Dormeur du val »

                                    C’est un trou de verdure où chante une rivière
                                    Accrochant follement aux herbes des haillons
                                    D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
                                    Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

                                    Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
                                    Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,

                                    Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
                                    Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
                                    Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

                                    Souririt un enfant malade, il fait un somme :
                                    Nature, berce-le chaudement : il a froid.
                                    Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;

                                    Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
                                    Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
                                                        Arthur Rimbaud, Poésies, 1870.




          Champ lexical de la vie                                 Champ lexical de la mort

          →  chante une rivière (strophe 1)                       →  bouche ouverte, tête nue, (str. 2)

          →  accrochant follement (str. 1)                        →  trou (str. 1)
          →  le soleil luit (str. 1)                              →  dort (str. 2)
          →  mousse de rayons (str. 1)                            →  étendu (str. 2)

          →  où la lumière pleut (str. 2)                         →  pâle (str. 2)
                                                                  →  lit (str. 2)



          La suite du poème renforce cette opposition dont le but est de faire ressortir l’horreur de la mort.







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