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NE DÉCIDE PAS QUI VEUT
Il est neuf heures et je prends le chemin des Quatre Vies qui
mène directement à la Forêt du Seuil. Une dernière
promenade matinale.
Le soleil est levé, cyclope brumeux, j’entends firguloter à
l’avance des premiers pas chaussée de brodequins, la dure
réalité se déterre aux muscles citadins et les semelles piochent
le terrain et les souffles criards s’éprennent à cajacter sur le
paravent gauche de la lisière…
J’entends à miauler les efforts, à hennir les pensées… prisons.
Mon dernier pèlerinage ne sera pas pour me cajoler… Je
connais toute ma souffrance à glousser d’indécence, et je prie
mortellement… à mon pas d’oraison, je me cause du souci et
m’embarque lourdement sans espérance…
Je m’invite à cacarder, à résister… et à me tracer une ligne de
sauvetage…
Alors, pourquoi je jase à m’affirmer mon échec et entreprendre
l’impensable marche vers le néant ?
Je suis au seuil du Seuil. Il me faut l’ultime pas franchir sans
réveiller le geai, gardien du lieu, mais, j’hésite, le pied d’appel
en suspension à ma demande, je le retiens et puis… le repose
en… arrière. Non, ce n’est pas aujourd’hui que je franchirais…
il me reste encore une dernière vie à consommer…
— Mon ami, vous allez être gâté… vous l’oiseleur… me dit le
geai, qui me surprend…
— Ah, oui ?
— Vous allez vivre en oiseau
— Quelle poisse…