Page 164 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE BIS
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CHEZ GUY LAROCHE
A vrai dire c'était une époque dorée. Je n'imaginais même pas la
chance qui m'avait été offerte avec cette opportunité d'entrer chez un
couturier parisien, avenue Montaigne par la grande porte ! Avec le
temps j'avais fini par trouver cela normal, malgré quelques candidats
qui se présentaient au studio, bardés de diplômes, venant proposer
leurs services à M. Laroche, qui leur annonçait n'avoir besoin de
personne. Elle était loin derrière moi, l’époque à croupir dans un
bureau derrière une machine à écrire, comme mon tout premier job,
et partager mon temps professionnel avec des gens d'une mentalité
différente, là j’étais totalement dans mon élément.
Chaque matin j'arrivais à la boutique Guy Laroche, que je
traversais, avant de prendre l'ascenseur qui me conduisait au studio,
et au passage je m'aspergeais à profusion de parfum, devenu par la
suite un rituel quotidien, puisqu'il trônait en permanence sur un
présentoir ostentatoire. J'adorais ce merveilleux parfum, Fidji, qui
faisait désormais partie de ma vie. J'en étais totalement imprégnée,
comme une seconde peau. Je continuais également à arborer
pratiquement tout le temps des tenues plutôt excentriques, mais de
bon goût, plus ou moins avant-garde, que je retrouvais revisitées la
plupart du temps dans les collections en cours. Les tenues que
j’arborais étaient pourtant en total décalage vestimentaire de
l'époque.
Le fait de travailler chez un couturier stimulait mes neurones et
donnait libre cours à mon inspiration. J'étais d'ailleurs assez souvent
complimentée par M. Douvier, le directeur artistique, et je me
souviens avoir un jour prêté à M. Laroche, une de mes tenues que
j'avais personnellement réalisée. Il l’avait tellement aimée qu'elle
figurait dans une collection, à l'identique jusqu'à la matière
employée pour sa réalisation.
C'était plutôt flatteur pour moi l'idée d'être appréciée des deux
"Guy", ce qui était réciproque d'ailleurs, pour leur gentillesse à mon
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