Page 173 - LES FLEURS DE MA MEMOIRE BIS
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LA GOURMANDISE EST UN VILAIN DÉFAUT
Avec ce job partagé entre M. Laroche pour la haute-couture et le
directeur artistique M. DOUVIER, pour le prêt-à-porter, sans oublier
la réalisation de dessins de tissus exclusifs pour cette nouvelle ligne,
et les différentes licences, il est évident que je me sentais un peu
comme chez moi dans cette maison où j'avais l'impression que les
portes m'étaient grandes ouvertes. Alors, quoi de plus naturel que de
se comporter comme chez soi !
C'était une collection haute-couture particulièrement réussie
qui avait vu le jour. Il y avait une robe parmi tant de merveilles qui
avait attirée mon attention. Je me voyais déjà la porter. Elle était
réalisée dans une triple épaisseur de mousseline de satin de soie,
doublé de la même matière, avec un décolleté en cache-cœur et
agrémentée d'un volant jusqu'au bas de la robe, dans un lumineux
coloris, violet cardinal. C’était une divine robe de sirène !
J'étais ce soir-là, invitée à une première au théâtre, interprétée
par Jean Piat et Maria Pacôme. Une fois de plus, j’étais accompagnée
de mon élégant partenaire, Branco qui m'avait gentiment proposé
cette idée de sortie. Je désirais assumer cette soirée avec classe et
élégance, et la pensée d'emprunter cette magnifique robe dans la
collection en cours m’obsédait. L'idée était totalement utopique, il
n'était même pas question d'y songer. Il valait mieux se rabattre sur
le placard aux nanars, devenu ma seconde garde-robe et qui
soudainement me parut trop fade.
Finalement je ne résistais plus à l'idée de l’emprunter, ce que je
fis, y ajoutant une cape de crêpe de laine assortie au ton de la robe, et
dénichée dans le placard aux nanars. J'eus malgré tout bonne
conscience d’avertir l'attaché de presse avec lequel j'entretenais une
relation complice, ce qui me soulagea de cet emprunt malhonnête et
interdit.
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