Page 292 - La pratique spirituelle
P. 292

Un matin, je me maquille. Est-ce une action primordiale et de
            pure conscience impersonnelle ou est-ce le jeu de mon ego, qui
            cherche à flatter sa propre image, utilisant donc le corps pour
            le ramener à lui ? En ce cas l’action est tellement conditionnée
            qu’elle me semble être tout à fait personnelle.                                                 Chapitre 26
               Si le maquillage est fait sur un mode automatique, il
            n’est que mémoire conditionnée. S’il est accompli dans                                        La question
            la conscience, il prolonge sa beauté et l’exprime dans
            l’espace-temps.                                                                            « Qui suis-je ? »


            N’y a-t-il jamais personne, que des émanations de conscience
            sans racine, qui ne m’appartiennent pas, et qui expriment sans
            histoire et sans passé ? Ces questions-là, cette respiration, ces
            pensées, ce paysage par la fenêtre...
               Oui, tout à fait. Cherchez le moi, vous ne le trouverez                   Lorsque je lis et intègre certaines de vos réponses, il y a dans
            jamais. Car il n’est qu’une pensée. Et saisir une pensée est                 le corps une sorte d’acquiescement avec le réveil des sensa-
            tout aussi impossible que d’attraper un bol d’air avec une seule             tions propres à la respiration, aux mains ou aux pieds. Et c’est
            main.                                                                        comme si le bonheur intellectuel de comprendre quelque chose
                                                                                         était rapidement traduit dans des sensations corporelles. Aussi,
            Vos réponses m’ont particulièrement touché, et je ressens beau-              pourquoi seulement à certains endroits, tels que les pieds par
            coup de gratitude à votre générosité. Peut-on prier ? Peut-on                exemple ?
            tout enlever ? Peut-on se dévêtir sans compromis aucun, se                      Le corps est une caisse de résonance. La jouissance propre
            mettre à genoux, tout donner, tout lâcher, se perdre complète-               à la révélation du vrai se répercute dans la structure corporelle.
            ment, se dissoudre ?                                                         Tout comme un instrument, qui peut être plus sensible dans
               Peu importe le nom donné à ce qui reçoit l’abandon.
            L’essentiel est dans l’abandon lui-même, cette dissolution des               les graves que dans les aigus, ou inversement, le corps a aussi
                                                                                         ses zones de vibration privilégiées.
            prétentions égotiques, et la nudité qui les remplace.
                                                                                         « Qui » ressent cette jouissance, ce bien-être ? « Qui » est com-
                                                                                         blé à ces moments-là ? Puisqu’il n’y a personne, et pourtant cette
                                                                                         extraordinaire perception est bien là, et quelque chose en est
                                                                                         comblé.
                                                                                            C’est la joie du non-manifesté qui transpire dans la
                                                                                         manifestation.




                                                                                                                  293
   287   288   289   290   291   292   293   294   295   296   297