Page 204 - Desastre Toxicomanie
P. 204

Le désastre des toxicomanies en France                                                                                 Les médicaments détournés de leur usage



                 l’entrée de ces ions Cl  dans le neurone, ce qui hyperpolarise sa
                                       -
                 membrane et, partant, réduit son activité électrique. Ces molécules,
                 en se liant à un site qui leur est propre, accroissent l’affinité du
                 GABA pour ses récepteurs et, ainsi, intensifient son activité.
                   Les recommandations de la Haute Autorité de Santé (H.A.S.)
                 stipulent  que la prescription  d’un hypnotique  ne devrait  pas
                 excéder  une  durée  d’un mois  (étant  compris  le  temps  de  la
                 décroissance des doses). Dans une thèse que j’ai dirigée en 2011, il
                 a été constaté que cette recommandation était peu suivie. Nombre
                 de nos contemporains recourent donc, de façon quotidienne, à la
                 prise d’un hypnotique pour « gérer » leur sommeil.
                   La consommation d’anxiolytiques, apparaît telle une exception
                 française, puisqu’elle est 12 à 15 fois plus élevée qu’en Allemagne,
                 qu’aux Pays-Bas et qu’au Royaume-uni. Notre consommation
                 d’hypnotiques est, elle, six fois supérieure à celle de l’Allemagne
                 et des Pays-Bas, et trois fois supérieure à celle du Royaume-Uni.
                   Avant de répéter sur un mode psittacique, jouant de la méthode
                 Coué, que nous sommes les plus heureux et même  parfois,
                 pendant qu’on y est, les meilleurs et les plus intelligents du monde,
                 interrogeons-nous sur les raisons de nos records en matière  de
                 consommations de drogues et de certains psychotropes. On peut
                 douter de découvrir l’explication  du bonheur exceptionnel  qui
                 serait le nôtre, dans nos débordements d’usage et d’abus de ces
                 psychotropes.
                   Les benzodiazépines induisent une dépendance psychique. Le
                 confort  nouveau  qu’éprouve  l’anxieux  vis-à-vis  de  son anxiété
                 ou l’insomniaque  vis-à-vis de son sommeil,  l’incite à user des
                 benzodiazépines d’une façon quotidienne et, ainsi, à en abuser. La
                 dépendance physique est masquée (comme l’est celle du THC du
                 cannabis) par la longue demi-vie du/des métabolite(s) pertinent(s)
                 produits à partir des benzodiazépines anxiolytiques ; pourtant cette
                 dépendance  existe.  Elle  devient  éclatante  quand  on administre
                 à l’animal d’expérience, traité de façon semi-chronique par une
                 benzodiazépine, un antagoniste du récepteur aux benzodiazépines,
                 le  flumazénil, Anexate  (qui  a  été  utilisé  en  réanimation  pour
                                       ®
                 traiter un coma provoqué par une surdose de benzodiazépines).
                 Les manifestations  d’abstinence  qui surviennent consistent


                                              204
   199   200   201   202   203   204   205   206   207   208   209