Page 213 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France                       À qui profite la drogue ?



                   chaîne du profit, les plus mal rétribués, même si leurs produits
                   sont plus rémunérateurs  que  les  cultures  traditionnelles  qu’ils
                   auraient pu faire. Il est ainsi d’un meilleur rapport de faire pousser
                   dans le Rif (au Maroc) du chanvre  indien que du blé dur. La
                   plus-value la plus importante, assurée par le cannabis, se situe
                   en aval du chaînon de ces petits producteurs ; celui des « gros
                   bonnets  ».  Ces  trafiquants  lui  font  traverser  la  méditerranée  et
                   l’attendent sur la côte Est de la péninsule ibérique ; non loin de
                   leurs splendides villas. Le stockage s’effectue, bien sûr, en dehors
                   de celles-ci. La marchandise est prise en charge dans ces planques
                   par des transporteurs variés : des poids lourds, qui le dissimulent
                   au milieu d’autres denrées ; la caravane d’un couple de retraités
                   (anecdote  récente) ; des convois de deux ou trois voitures, de
                   très grosses cylindrées, qui, en une nuit, traversent l’Espagne, à
                   très vive allure, pour arriver en région parisienne ou en d’autres
                   agglomérations (« go fast »). Le stockage s’effectue alors dans
                   des garages ou des caves d’immeubles.  Quelques stockages
                   secondaires sont effectués chez des particuliers, auprès desquels
                   les dealers viennent s’approvisionner. Ces stockeurs complaisants
                   reçoivent  quelques centaines  d’euros par mois, qui viennent
                   grossir leurs petites  retraites.  Pour les dealers, la rétribution
                   dépend du nombre de clients qu’ils servent ; cela leur assure sans
                   trop de fatigue, mais pas mal d’adrénaline, un revenu mensuel de
                   quelques milliers d’euros ; trois à six fois ce que gagne leur père
                   rémunéré au SMIC. La prestation des guetteurs, qui « sécurisent »
                   le deal (en téléphonant aux dealers s’ils ont repéré des « flics » en
                   tenue civile rodant à l’entour), est rétribuée une centaine d’euros.
                   Une barrette de « shit » de 10 grammes est vendue environ 50 €.
                   En fait les prix varient selon le lieu, le moment, la qualité alléguée
                   au produit et la quantité acquise. Le budget « shit » mensuel d’un
                   consommateur régulier (au moins un « joint » tous les trois jours)
                   s’établit autour de 30 € mais, chez l’accro à 5 « joints » par jour, il
                   passe à près de 400 € par mois, auxquels s’ajoute le prix du tabac ;
                   le tabac constitue le support galénique pour la combustion de la
                   résine de cannabis ; il participe à la confection des « joints ». Il
                   faut ajouter encore à ce budget le prix des cigarettes du seul tabac,
                   fumées régulièrement dans l’intervalle de ces joints, pour pallier


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