Page 86 - Desastre Toxicomanie
P. 86
Le désastre des toxicomanies en France Immersion dans l’alcool
Pas en reste de critiques, les défenseurs des médicaments
réducteurs de la consommation d’alcool suspectent les tenants du
néphalisme de craindre la fermeture de leurs services d’alcoologie,
qui deviendraient inutiles.
Je souhaite que cette présentation du débat ne donne pas au
lecteur l’impression que j’ai choisi mon camp. N’étant pas
actuellement en mesure de le faire, je ne le ferai que lorsque
des études suffisamment larges et sur une assez longue durée,
aboutiront à des résultats homogènes, s’affranchissant d’une
collection d’anecdotes.
Baclofène or not baclofène ?
Un musicien brillant, un médecin cardiologue, qui ne l’était
pas moins, Olivier Ameisen, vint à être victime de la dépendance
alcoolique. Armé d’une bonne culture biologique, ses lectures
lui firent entrevoir l’intérêt du baclofène = para chloro phényl
GABA (Liorésal ), pour vaincre sa dépendance. Ce médicament
®
est commercialisé de longue date (1974) comme antispastique/
myorelaxant, à des doses de l’ordre de 50 mg par jour, pour réduire
des spasmes musculaires, qui peuvent être très perturbants, dans
la sclérose en plaques en particulier. Ce médicament avait déjà
été proposé, à partir de quelques études, pour aider au sevrage du
cocaïnomane. Ameisen l’auto-expérimenta, à doses croissantes,
dans l’espoir de vaincre le démon de l’alcool qui le rongeait. Il
constata qu’à des doses supérieures à celles pour lesquelles ce
médicament développait son effet antispastique, il diminuait sa
vive appétence pour l’alcool. Les doses efficaces dans l’alcoolo-
dépendance et l’alcoolisme sont 4 à 6 fois supérieures à celles
utilisées comme antispastique.
La machine médiatique s’est alors mise en route,
surchauffée par quelques praticiens, dont Ameisen lui-
même, avec son livre grand public « Le dernier verre »
(Denoël, 2008). Elle a été relayée par Renaud de Beaurepaire
(Albin Michel, « Vérités et mensonges sur le baclofène »)
et par quelques autres praticiens. Ces auteurs et leurs livres ont
passionné ce débat et, comme trop souvent, l’ont éloigné des quais
de la science, dont celui de la pharmacologie clinique, auquel il
86