Page 87 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France Immersion dans l’alcool
aurait dû rester amarré. Sous la pression des médias, plus que
de l’opinion (légitimement interrogative) et de ces praticiens
militants, l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament),
actuellement très sensible aux courants d’opinion, à l’idéologie et
à certains lobbys, avant même de disposer des résultats d’études
en cours (Programmes Hospitaliers de Recherche Clinique =
PHRC), a donné à ce médicament une autorisation temporaire
d’utilisation (A.T.U.), pour son administration à hautes doses,
dans la dépendance à l’alcool. Aussitôt, un certain nombre de
praticiens, comme saisis par la peur d’être en retard, se sont mis à
le prescrire abondamment.
Considérant le mécanisme d’action de ce baclofène, l’idée
d’envisager son utilisation n’est pas illogique, au point même qu’on
peut la trouver intéressante. Elle justifie la mise en œuvre d’études,
avec la rigueur qui doit présider à celle de tout médicament. La toxicité
expérimentale de ces doses élevées de baclofène, n’ayant pas encore
été explorée (seule la toxicité de plus faibles doses, pour l’indication
antispastique, a été déterminée), il est urgent de la déterminer.
Pour ce faire, il faut étudier l’effet de doses élevées, administrées
chroniquement (car dans cette nouvelle indication, il s’agirait d’un
traitement au long cours). Ces études devraient être effectuées sur des
animaux de plusieurs espèces ; qui devraient préalablement à l’essai,
être soumis à une alcoolisation chronique d’un niveau important ;
cette alcoolisation devrait être maintenue pendant tout l’essai,
puisque ce médicament serait destiné à des patients alcooliques
non sevrés, avec des niveaux élevés d’alcoolémie.
Pour échauffer davantage la machine médiatique, il fallait trouver
des boucs émissaires. Certains ont incriminé des pressions exercées
par des alcooliers pour retarder la commercialisation du baclofène
dans cette indication ; ces alcooliers redoutant la réduction du vaste
réservoir des alcooliques dans lequel ils déversent leur poison.
Des addictologues – alcoologues ont également été incriminés ;
leur légitime prudence étant interprétée comme leur crainte de
voir fermer leurs services d’alcoologies (à l’image des sanatoria
après l’avènement des médicaments antituberculeux). Argument
fallacieux à l’heure où ces services, qui étaient spécialisés dans
l’alcoologie, s’ouvrent à la prise en charge d’autres toxicomanies.
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