Page 29 - LUX in NOCTE n°1
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-Tu peux répéter s’il te plaît !
-Oui, poste de « bourreau qualifié », cadre supérieur dans un pays d'Afrique. Il
sera retenu le/la candidat/e qui aurait fait preuve de plus de fantaisie et d'humanité
dans son travail.
Jinou relut cette annonce de façon très hésitante obligeant sa mère à une
écoute plus attentive. La fonction bien rémunérée demandait une disponibilité
immédiate et le passage d'un concours. La mère de Jinou, se dit qu'avec son
éventuel salaire, elle pourrait assurer la fin des études de son fils et même
économiser en vue de l'ouverture d'un cabinet médical et sûrement, le travail ne
devait pas être trop fatigant. Jinou protesta mollement à cette idée mais finit par
l'accepter en raison de son caractère temporaire car dans deux ans sa mère devait
prendre sa retraite.
Le lendemain, la vieille femme prit son courage à deux mains, téléphona et
d'une voix craintive accepta le rendez-vous proposé par le service du personnel.
L'entretien se passa convenablement, mais elle n'avait pas bien saisi quel sera
exactement le contenu du travail et encore moins en quoi consistait le test et le
concours pour l'embauche. Néanmoins, elle accepta de signer un papier qui
l'obligea de suivre le test jusqu'au bout sous peine d'emprisonnement en cas de 28
désistement car l'organisation de ce concours était très coûteuse pour les futurs
employeurs.
Un mois plus tard elle reçut une convocation. Le test, en plusieurs étapes,
consistait dans l’exécution de sujets qui restaient inconnus jusqu'à la dernière
seconde. Pour commencer, elle devait tuer des insectes : araignées, fourmis,
cafards...Quoiqu’inquiète, la vieille femme qui détestait les insectes mit du cœur
à l'ouvrage et s'en est sorti très bien. Ensuite vint le tour de petits animaux et
reptiles : souris, serpents... et elle trouva une solution originale qui lui a valu
beaucoup de points en emportant le chat de la voisine pour les petits rongeurs et
le mainate de la fleuriste pour le serpent.
Ce fut relativement facile et en rentrant elle constata avoir trouvé plus
d'aisance et même avoir pris un certain goût pour le métier. Suivirent d'autres
exécutions : chats, chiens, un crocodile, un agneau...Avec l'agneau elle avait eu
du mal, car la brebis était tout présente et bêlait désespérément ; mais, on la
rassurait en lui disant que ce n'était pas grave, car elle allait tuer la brebis le
lendemain. En même temps elle reçut une somme d'argent assez conséquente pour
le travail déjà accompli.
Enfin, l'instant fatidique arriva : elle devait exécuter un humain, un inconnu
dans deux jours. Des visions épouvantables, des cauchemars insoutenables
hantèrent sa nuit. Elle ne pouvait plus manger et la couleur rouge lui provoqua
des spasmes. Le fait de trancher la gorge d'un condamné ou de lui tirer une balle
dans la tête lui semblait impossible.