Page 28 - LUX in NOCTE n°1
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Bourelka




                     Après  des  années  d'études  en  médecine  et  pendant  sa  spécialisation  en

               psychiatrie, Jinou cherche désespérément des fonds pour ouvrir son cabinet. Sans
               aucune garantie financière, tous ses entretiens avec les banques ont échoué. Il
               habite un F2 au rez-de-chaussée dans une banlieue sordide où il vit avec sa mère

               qui depuis des années fait des ménages pour assurer leur existence.
    27               Le père les avait quittés très tôt pour « incompatibilité d'humeur ». De temps

               à autre il donne des signes de vie et sans jamais se soucier de leurs besoins il étale
               dans de brèves lettres la progression de sa carrière professionnelle. Actuellement,

               il est responsable de la plus grande société d’intérim de la ville, institution très
               importante  pour  les  milliers  de  chômeurs  d'une  région  sinistrée  par  les

               délocalisations et la crise économique en général. Sans autre solution, à contre
               cœur et sans rien dire à sa mère, Jinou lui téléphona et obtint un rendez-vous le
               jour même en fin d'après-midi. L'entretien fut extrêmement long et il rentra le soir
               tard  harassé,  fatigué,  avec  dans  la  poche  un  papier  froissé  sur  lequel  étaient

               griffonnées, presque illisibles, une dizaine d'annonces concernant quelques offres
               de travail.
                       En observant l’entête de l’entreprise d’intérim sur les papiers de son fils,

               sa mère l’interpella assez sèchement.
               -Jinou, oublie toute autre chose en dehors de tes études. Tu n’as pas à gagner de
               l’argent  et  encore  moins  à  quémander  l’aide  de  celui  qui  nous  a  lâchement

               abandonné dans la misère et le désespoir. Occupe-toi de ta thèse ! Nous avons
               survécu, nous survivrons. Mais, donne-moi les annonces car il y a peut-être un
               travail pour moi, pas trop fatiguant et correctement rémunéré.

               - Non, je préfère les lire. Et il le fit lentement, d'une voix morne et sans intérêt.
               La vieille femme tiqua sur l'offre la plus bizarre.
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