Page 27 - LUX in NOCTE n°1
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Voyage retour.
Le train suit le rivage, nous venons de quitter Cannes. La mer est bleue,
couleur d’azur, couleur de roy, aux multiples facettes blanches. Un bleu qui varie,
qui joue les camaïeux, dont l’intensité happe le regard, fascine, dont l’immensité
vient lécher les rochers rouges. Le spectacle est « nature ». Bleu gris vert bleu de
mer indigo. Sous le soleil l’eau et la terre resplendissent. Atmosphère de vacance,
rêves d’un siècle passé, de vies enfouies dans les villas aux riches décors de stuc,
aux colonnes à chapiteaux. Décor de théâtre, celui des romans d’une jeunesse
dorée. Sous les ombres des palmiers soutenus par les cyprès et les plantes grasses,
la végétation exubérante s’affirme sous la lumière aveuglante et chaude de
l’automne.
Le voyage se poursuit. Le jour s’épuise et le soir tombe. Des églises
surgissent des collines le long du trajet. Des clochers comme des piliers, des
repères dans la mouvance des plaines. Sur l’horizon ou au creux des valons, des
villages serrés dans ce crépuscule mordoré. Beauté fugace qui surgit et s’efface
absorb eé par le train qui galope. La lumière se meurt doucement, les
arbres s’estompent, bientôt les ombres seront indistinctes, premier et second
plan se rejoindront sans raison. A droite, le feu du soleil derrière la montagne, le
coucher ce soir du Dieu égyptien attire le regard. De l’autre côté, les lignes 26
violettes des nuages au-dessus des massifs imitent les fonds pastel des grands
peintres.
A la vitesse des chevaux-vapeur, à la vitesse de l’imagination, le temps défile
et surfile une espérance illusoire. Suspendre l’instant ! Arrivera inéluctablement
l’entrée en gare.
Vivianne Melh