Page 559 - Traité de chimie thérapeutique 6 Médicaments antitumoraux
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22. BLÉOMYCINES                                         517

               Le soluté injectable est administré en perfusion IV lente ou en IM (voies les plus fré-
             quentes), mais aussi en injection sous-cutanée, intra-artérielle ou intra-cavitaire. La
             posologie moyenne en monothérapie est de 15 à 20 mg/m°, une à deux fois par semaine
             jusqu'à une dose totale cumulée de 300 mg. En polychimiothérapie, cette dose est
             abaissée à 5 à 10mg/m?. La bléomycine est comprise dans des associations comme le
             protocole ABVD : doxorubicine, bléomycine, vinblastine, dacarbazine (lymphomes hod-
             gkiniens) ou est associée notamment au cisplatine et l'étoposide ou la vinblastine (lym-
             phomes non hodgkiniens, carcinomes testiculaires).

             10.  EFFETS INDÉSIRABLES
             La bléomycine a un profil de toxicité très spécifique comparé à celui de la plupart des
             autres composés antitumoraux. Les effets indésirables sont constitués par:
             - des fibroses pulmonaires avec dyspnée, tachypnée, toux non productive, râles : cette
               toxicité, cumulative, est retrouvée chez environ 10 % des patients et fatale dans 1 à
               2% des cas. Les facteurs de risque sont une dose totale cumulée supérieure à
               300 mg, un âge supérieur à 70 ans, une radiothérapie associée, une pneumopathie
               préexistante, une fonction rénale défaillante, l'administration d'oxygène à une con-
               centration supérieure à la normale (par ex. pendant une anesthésie générale), l'asso-
               ciation avec certains autres agents cytotoxiques comme la vincristine. Le risque de
               toxicité pulmonaire est diminué si le médicament est administré par perfusion plutôt
               que par IV bolus ;
             - des réactions hyperthermiques : la fièvre apparait chez beaucoup de patients quel-
               ques heures après l'administration et peut être traitée par des antipyrétiques comme
               le paracétamol ou par des antihistaminiques ;
             - des lésions cutanéomuqueuses : hyperpigmentation du tronc, érythème des pieds et
               des mains, épaississement de la peau et des ongles. Il s'agit d'une toxicité cumulative
               retrouvée chez presque tous les patients et régressant spontanément à l'arrêt du
               traitement ;
             - des réactions anaphylactiques (hypotension, bronchospasme) présentées parenviron
               1% des patients ;
             - autres toxicités retrouvées dans un nombre limité de cas : alopécies réversibles, nau-
               sées légères, inflammation des muqueuses.
               La bléomycine n'entraine que très rarement une myélosuppression, ce qui la rend
             particulièrement intéressante pour l'inclure dans divers protocoles de polychimiothéra-
             pie.
             11.  CONTRE-INDICATIONS

             Les contre-indications sont la grossesse, l'allaitement et l'insuffisance respiratoire sévère.
             12.  CONCLUSION - PERSPECTIVES

             La dualité de structure (une partie intercalante associée à une partie chélatante réactive)
             confère une efficacité unique à la BLM. Bien que l'approche au niveau moléculaire de
             son mécanisme d'action soit satisfaisante, une meilleure connaissance du mécanisme
             de sa sélectivité d'action sur les cellules tumorales apparait nécessaire pour rationnaliser
             la recherche de molécules plus efficaces. En fait, cette bipolarité de la molécule a servi
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