Page 35 - Lux in Nocte 14
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Le Danemark semble être le bon endroit pour l'existentialisme,
l'atmosphère oppressive étant un état naturel. Ce mois de Mai, marque le
207 anniversaire de la naissance de Søren Kierkegaard, pionnier de la
ème
pensée existentialiste. Il ferma les yeux à l'âge de 43 ans, en novembre 1855,
vaincu par la maladie et la dépression qui accompagnèrent sa vie.
Dans son premier livre, « 2X ELHQ«RX ELHQ », le philosophe cherche le
sens de la vie, un éventuel chemin entre laïcité et religiosité. On cite souvent
son propos : « La vie n'est pas une énigme à résoudre, mais une réalité à vivre ». A-t-il
choisi le réalisme plutôt que la poésie ? Peut-être ... J'ai en main le livre écrit en
1943, « Le journal d'un séducteur ». Kierkegaard y décrit le jeu d'amour du
jeune Johannes - fasciné par l'esthétique - avec la belle Cordélia. Voici un
extrait : « L'imagination est le rougissement naturel du beau sexe », écrit-il, sans
oublier G·DMRXWHU « Rien n'est plus enveloppé de charme et de malédiction que le secret ».
On pourrait penser qu'une amitié entre lui et Christian Andersen, qui
n'était qu'un peu plus âgé, aurait pu se nouer dans le charme de la pensée
nordique. Fait intéressant, les deux auteurs se détestaient et se critiquaient
avec virulence.
Je laisse ma pensée voyager à travers le temps, errer parmi les rêves et les
idéaux éthiques au rythme de nos pas silencieux. Derrière nous, une lampe en
forme de grand parapluie translucide V·DOOXPH VXELWHPHQW GDQV O·DWWHQWH G·XQ
possible acheteur. Mais qui achète, avec vingt mille euros, un parapluie,
victime GpVLJQpH G·XQ court-circuit à la première goutte de pluie ? Et
SRXUWDQW« 4XL VDLW ? Parfois, nous avons des désirs exotiques ...Telle la sirène
d'Andersen ! Elle voulait l'impossible et a tout sacrifié pour l'obtenir.
Enfin, mon ami se manifeste à travers un soupir et profondément attristé
V·LQWHUURJH
- Comment pourrait-il offrir ou abandonner sa voix ? N'a-t-il pas réalisé que
sans voix, sans son glas, il n'avait aucune chance ?
Je reste silencieuse, m'enfonçant dans les vagues de ma mer intérieure ...
Ne donnerais-je pas ma voix pour une rencontre DYHF O·(WUH cher ? Ne
penserais-je pas que le regard, le sourire peuvent tout dire ? Je m'apprête à lui
expliquer la logique irrationnelle de l'amour, quand je l'entends ajouter :
- Quelle absurdité, demander sa voie O H[SUHVVLRQ GH VRQ kPH«
Je le comprends. Je pense à la conteuse, Shéhérazade qui allait révéler ses
rêves au sultan. Que serait Shéhérazade muette, sans voix ?
Cette fois, convainquez-moi. Avec une détermination louable, je décide
de prendre soin de mes cordes vocales et pendant que je prépare ma sérénade
de paroles du soir, je place soigneusement mes lunettes sur le nez. Nous
buvons nos dernières gorgées de café. Je m'enveloppe de silence alliant en moi
la maîtrise du conteur Andersen à l'esprit clair de Kierkegaard :
« Les lunettes cachent beaucoup de choses - même une larme aux yeux » ...
VRPPDLUH
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