Page 22 - J'aime autant te hair
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Une aube rose pâle se lève sur Brazzaville, laissant entrevoir la
promesse d’un jour ensoleillé. D’un bond je m’extirpe des draps, les bras
battant l’air et les yeux exorbités. Un appel masqué s’affiche sur mon
portable, mais je décide de l’ignorer. Je pars en direction de la cuisine me
faire une tasse de café, consulter la pendule et écouter les nouvelles. Rien
de bien intéressant aujourd’hui. Mais encore faut-il toujours que les
médias du monde, s’interrogent sur l’avenir du Proche-Orient. Va savoir
alors. Et comme qui dirait mon père, cette enflure de Bachar el-Assad a
les crocs, parce que Poutine se charge de lui remplir les fesses.
Dans la brume opalescente de la ville, je sors mes deux poubelles,
les services publics vont se charger du recyclage. Je ne l’ai pas vu venir
mais une voiture stationne juste devant moi. L’angle est précis pour faire
obstruction. C’est une Mercedes-Benz S 560 Cabriolet 2018. Je la
reconnais parce qu’elle a été dévoilée lors du salon de Genève, la nuit où
mon frère fut élu député.
La glace se rabaisse lentement, deuxième portière à gauche, je crois
reconnaitre l’homme.
_ Montez sans discuter. Pour une fois qu’il ne porte pas un tailleur
symétrique, Brandon a vraiment l’air d’un petit garçon dans sa tenue de
golf. Je le dévisage incrédule.
_ Qu’est-ce que vous me voulez, dois-je vous rappelez qu’on ne
travaille plus ensemble ? J’essaie de me frayer un chemin.
_ Vous avez vraiment une sale tête au réveil, c’est bien dommage,
je me faisais un plaisir de vous inviter à nous rejoindre. Dit de cette façon
la voiture redémarre.
Je suis abasourdie, cet homme est vraiment dégoutant, la pire des
racailles quoi. Moi, avoir une sale tête au réveil ? J’avoue que mes
cheveux sont un peu ébouriffés en ce moment, mais pas au point d’être
aussi crasseux que laissait à deviner son expression faciale. Devant ma
mine effarée, Brandon prenait son air satisfait. Ce jeu est dangereux, il le
perdra sans doute. Battus par un vent vif, la route qui mène à mon
appartement, me semble à l’autre bout de la planète. Tant pis. Je me
retourne pour voir disparaitre la voiture, dans un grand axe routier.
La sonnerie du téléphone retentit à nouveau dans le couloir. Je me
redresse brusquement sur les fesses, trois milles interrogations dans ma
tête. Au sol, ma moquette imitation jersey est censée rappeler le gris de
mademoiselle Channel. Maintenant, elle n’est plus qu’un terrain jonché de
pétales de corn flakes. Je m’approche du guéridon où se trouve l’appareil.
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