Page 29 - J'aime autant te hair
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Lu cet instant, je ne sais pas quel sentiment est le plus fort chez
                      moi, la colère ou la peur. Mission de reconnaissance un, camouflage zéro.
                      D’un pas raide je décide de m’éloigner.
                             _ Que me voulez-vous ? Ne me dites pas que vous me faites suivre

                      maintenant ? Les narines frémissantes, je parais abasourdie et mes lèvres
                      s’entrouvrent.
                             _ L’agent de police que vous avez retrouvé cette nuit et aviez
                      gentiment sauver la vie mademoiselle, figurez-vous que c’est un cousin
                      proche. Donc je suis en mesure de lui rendre visite tout autant que vous.
                             Cette annonce aussi succincte que définitive, flotte dans l’air

                      comme un linceul emporté par la brise.
                             _ Je ne savais pas. Veuillez m’excuser je dois rentrer chez moi,
                      maintenant que la famille du patient est arrivée. Je déclare solennel.
                             Dehors, les ombres d’une pleine lune, de plus en plus denses
                      correspondent parfaitement à mon humeur.

                             _ J’oublie de fois que vous faites le babysitting à vos heures
                      perdues, vraiment. Tout ce cumul d’emploi ne vous surmène-t-il pas ?
                      Brandon me regarde de biais. Je traverse un ennui abyssal en sa présence.
                      Il est des gens qui semblent nés pour engraisser l’ennui disait Anne
                      Barratin. Je comprends maintenant. Plus loin encore elle ajoute que
                      l’ennui est une insuffisance.
                             _ Primo je ne suis pas une nounou. Secundo vous êtes à côté de la

                      plaque, si vous croyez que je vais me prendre au jeu. Tercio je dois
                      vraiment quitter cette ville, pour ne plus avoir à vous supporter.
                             « On pourrait définir l’ennui en disant que c’est un désir vague de
                      beaucoup de choses que l’on n’a pas clairement dans l’esprit, et qui
                      empêche de jouir de ce qu’on possède, espèce d’état de vague incertitude

                      qui jette dans la tristesse et le découragement sans que l’on puisse s’en
                      avouer la cause. Dès qu’on a fixé son esprit sur un point quelconque, cet
                      état disparait. Ou l’on s’afflige, ou l’on s’occupe, ou l’on s’égaye, ou l’on
                      se tourmente ; du moins on ne s’ennuie plus, et c’est avoir beaucoup
                      gagné. »
                             Cette brillante pensée de Constance de Théis tombe vraiment à pic.
                      Je peux voir la répulsion dans ses yeux écarquiller. Il doit être nerveux

                      que je lui tienne tête avec aplomb.
                             _ Je crois que…
                             _ Chère monsieur et madame, le bonsoir. Je suis le docteur Andzé
                      Gabrielle, le chirurgien chargé de prendre aux soins la victime de
                      l’accident. Êtes-vous un couple ? Non ? Alors qui d’entre vous pourrait





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