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Les débuts de la vie et l’enfance  183



                  Le stade phallique                                  La résolution du deuxième stade eriksonnien, c’est-
                  Au cours de son apprentissage de la propreté, soutient Freud,   à-dire l’acquisition de la volonté, se joue entre la confiance
                  l’enfant découvre ses organes génitaux et, vers 3 ou 4 ans,   de l’individu en sa capacité d’agir (autonomie) et le constat
                  il passe au stade phallique. C’est à ce stade, avance le père   de son incapacité à tout comprendre (honte et doute). Bois
                  de la psychanalyse, que les petits garçons éprouvent le   et  Bergeron suggèrent dans leur synthèse des travaux
                    complexe d’Œdipe. (Jung parlera plus tard du complexe     d’Erikson que, comme pour l’acquisition de l’espoir (par le
                  d’Électre chez les fillettes.) L’enfant découvrant ses organes   développement de la confiance) lors de la résolution du
                  génitaux et le plaisir qu’il peut en tirer ressent inconsciem-  stade précédent, les attitudes parentales suivantes facilitent
                  ment un sentiment « amoureux » envers le parent du sexe   l’acquisition de l’autonomie :
                  opposé et une rivalité avec le parent du même sexe, ce qui   •  ne jamais frapper l’enfant (ce geste a toujours des consé-
                  devient pour lui une source d’anxiété. Pour y échapper, il doit   quences négatives) ;
                  ultimement s’identifier au parent du même sexe que lui.  •  éviter de lui imposer un encadrement trop strict et des
                                                                         contraintes trop rigides ;
                  Dans la perspective psychodynamique, la tâche principale
                  du stade phallique est donc la résolution du complexe   •  respecter son rythme d’apprentissage ;
                  d’Œdipe ou d’Électre par l’identification au parent de même   •  favoriser des expériences nouvelles dans son milieu.
                  sexe et par le refoulement des pulsions sexuelles (entrée
                  dans le stade de latence) jusqu’à l’adolescence. Ainsi les   Le troisième stade : initiative ou culpabilité
                    garçons intégreraient à leur identité l’image de leur père, et   Vers l’âge de 3 ans, l’enfant acquiert de nouvelles habiletés
                  les fillettes, celle de leur mère. Pour résoudre le complexe   cognitives qui lui permettent notamment de planifier ses
                  d’Œdipe et avoir une personnalité saine, affirme Freud,   actes ; selon Erikson, c’est ce qui amorce le stade de l’initia-
                  l’enfant a besoin de la présence de ces deux figures paren-  tive, dont l’autre pôle est la culpabilité. La force adaptative
                  tales et doit pouvoir établir une relation chaleureuse et   de ce stade réside dans la capacité de se fixer un but, c’est-
                  aimante avec chacune d’elles.                       à-dire dans « le courage d’envisager et de poursuivre des
                  Rappelons que la théorie freudienne marque les débuts de   objectifs valables sans se laisser inhiber par la faillite des
                  notre compréhension de la psyché humaine et que son inté-  fantasmes infantiles, par la culpabilité ou par la crainte para-
                  rêt est plus historique que scientifique. Les travaux de Freud   lysante de la punition » (Erikson, 1974).
                  n’en demeurent pas moins intéressants par leur description   La capacité de se fixer des buts repose elle-même sur la capa-
                  de certains comportements des enfants de cet âge que les   cité de l’individu de planifier des actions (initiative) avec la
                  chercheurs observent encore aujourd’hui et sur lesquels nous   conscience qu’une énergie mal canalisée peut avoir des consé-
                  reviendrons dans la section sur le moi sexué (p. 189).  quences fâcheuses (culpabilité). Les attitudes parentales
                                                                      suivantes favoriseraient l’initiative (Bergeron et Bois, 1999) :
                                                                      •  permettre à l’enfant d’apprivoiser ses émotions (il doit
                  erikson et les stades de l’autonomie                   pouvoir les reconnaître et trouver en lui-même des res-
                  et de l’initiative                                     sources pour dominer ses peurs) ;
                                                                      •  lui apprendre ce qu’est l’intimité en lui montrant à res-
                  Erikson, lui, a plutôt insisté sur les aspects psychosociaux   pecter celle de ses parents ;
                  du développement à l’âge préscolaire, lequel est caractérisé
                  selon lui par les deux stades que traversent les enfants   •  encourager ses initiatives et répondre à ses questions ;
                  durant cette période et grâce auxquels ils acquièrent de   •  dédramatiser les échecs en insistant sur les réussites.
                  nouvelles habiletés physiques, cognitives et sociales : le   Selon Freud et Erikson, le développement sain durant cette
                    deuxième stade, dont les pôles sont l’autonomie ou la honte   période passe par un équilibre entre les nouvelles habi-
                  et le doute, et le troisième stade, dont les pôles sont l’initia-  letés de l’enfant et son désir d’autonomie d’une part, et la
                  tive et la culpabilité (tableau 2.3, p. 38).        nécessité pour les parents de le protéger et de l’encadrer
                                                                      d’autre part. Autrement dit, la tâche parentale, qui consistait
                                                                      jusque-là à lui fournir assez de chaleur, de constance et
                  Le deuxième stade : autonomie ou honte et doute     d’attention pour combler ses besoins ainsi qu’à favoriser
                  Le stade « autonomie ou honte et doute » est centré sur la   un attachement sécurisant, évolue. Quand l’enfant devient
                  nouvelle mobilité de l’enfant de 2 ans et sur le désir d’auto-  plus indépendant sur tous les plans, les parents doivent lui
                  nomie qui l’accompagne. Pour Erikson, la force adaptative   fixer des limites. S’il est trop encadré, il n’aura pas l’occa-
                  de ce stade est la volonté, c’est-à-dire « […] la ferme déter-  sion d’explorer suffisamment son univers ; s’il l’est trop peu,
                  mination d’exercer librement son choix aussi bien que la   il n’aura pas la chance d’acquérir les habiletés sociales essen-
                  maîtrise de soi, en dépit de l’inévitable expérience infantile   tielles à sa bonne entente avec les adultes et avec ses pairs,
                  de la honte et du doute » (Erikson, 1974).          comme le respect de l’intimité d’autrui.









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