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Les débuts de la vie et l’enfance  185



                  de l’enfant d’âge préscolaire sont plus précoces et plus raf-
                  finées que ne le croyait Piaget. En effet, dès l’âge de 4 ou
                  5 ans, l’enfant a déjà une théorie de l’esprit, soutiennent de
                  nombreux psychologues et chercheurs.
                  Les développementalistes ont constaté que la théorie de
                  l’esprit d’un enfant est corrélée avec son développement
                  cognitif. Ses résultats dans l’accomplissement des tâches de
                  Piaget ainsi que dans la résolution de problèmes conçus plus
                  récemment pour évaluer l’égocentrisme et la capacité de
                  distinguer l’apparence et la réalité prédisent ses résultats
                  dans l’accomplissement de tâches liées à la théorie de l’esprit
                  (Melot et Houde 1998 ; Yirmiya et Shulman, 1996). Les jeux
                  de simulation (« faire semblant ») semblent également contri-
                  buer au développement de la théorie de l’esprit ; les jeux de
                  simulation à deux ou à plusieurs, en particulier, y sont forte-
                  ment reliés (Lillard et autres, 2013). De plus, les chercheurs ont
                  découvert des liens entre le développement de la mémoire
                  de travail et la théorie de l’esprit (Benson et Sabbagh, 2010).

                  Les compétences linguistiques sont également associées
                  au développement de la théorie de l’esprit (Tomasuolo et   Les enfants de 2 ou 3 ans savent déjà que les idées,
                  autres, 2013). En effet, un certain degré de connaissance de   croyances et sentiments des autres influent sur
                  la langue pourrait être un préalable au développement d’une   leurs actes. Vers 4 ou 5 ans, ils saisiront le principe
                                                                           de fausse croyance.
                  théorie de l’esprit. Les développementalistes ont constaté
                  que les enfants d’âge préscolaire échouent dans les tâches
                  où l‘on fait semblant tant qu’ils n’ont pas atteint un certain
                  seuil de compétence linguistique générale (Astington et   perturbe le développement du langage, comme la surdité
                  Jenkins, 1999 ; Jenkins et Astington, 1996 ; Watson et autres,   congénitale ou une déficience intellectuelle, développent
                  1999). Le fait que les enfants souffrant d’un handicap qui
                                                                      leur théorie de l’esprit plus lentement que les autres va aussi
                                                                      dans ce sens (Kendall et Comer, 2010 ; Losh et autres, 2012).

                                                                      Des études récentes tendent à démontrer que, même avant
                                                                      2 ans, l’être humain possède déjà une théorie de l’esprit.
                                                                      Elles s’articulent autour du principe de fausse croyance, dont
                                                                      il sera maintenant question.

                                                                      Le principe de fausse croyance
                                                                      Les chercheurs ont voulu savoir à quel moment les enfants
                                                                      pouvaient se mettre à la place d’une autre personne et quel
                                                                      type d’information pouvait les amener à croire quelque
                                                                      chose qui est faux. Pour ce faire, ils ont aussi eu recours au
                                                                      test de l’éponge peinte en caillou décrit au chapitre précé-
                                                                      dent (p. 174). On s’en souvient, dans cette épreuve, l’expéri-
                                                                      mentateur dit à l’enfant, après lui avoir fait toucher l’éponge
                                                                      et l’avoir interrogé sur ce qu’elle semble être et ce qu’elle
                                                                      est vraiment : « Ton ami, lui, n’y a pas touché. S’il la voyait
                                                                      de là-bas, est-ce qu’il penserait que c’est un caillou ou une
                                                                      éponge ? » (Gopnik et Astington, 1988). La plupart des
                                                                      enfants de 3 ans répondent que leur ami va penser que c’est
                                                                      une éponge parce que c’est une éponge. Par contre, à 4 ou
                      La façon dont les parents conversent avec les enfants   5 ans, les enfants comprennent que, parce qu’il n’a pas tou-
                      de même que la sécurité de leur attachement et   ché à l’éponge, leur ami croira à tort qu’il s’agit d’un caillou.
                      de leurs liens influent sur le développement de la   Ils ont saisi le principe de fausse croyance ; ils comprennent
                      théorie de l’esprit.
                                                                      que quelqu’un peut se faire une fausse image de la réalité
                                                                      et que, le cas échéant, il se comportera en conséquence.









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