Page 20 - Fleurs de pavé
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Claude Cotard – Fleurs de Pavé.


            Une sirène retentit. Une femme appelle au secours parce
            qu'on   vient   de   lui   voler   son   litron,   c'est   une   querelle
            d'alcooliques. J'entends une bouteille éclater au sol. Je
            pleure en silence dans la nuit.
            Mes yeux se raccrochent aux couples à l'air inoffensif, aux
            amoureux de la nuit, à ceux qui jouissent du Paris festif,
            aux ouvriers pressés du petit matin. Eux ne peuvent pas
            me faire de mal..
            Combien de fois, me suis-je réveillé en sursaut de cette
            torpeur avec la méfiance, la vigilance au ventre, prêt à
            bondir et à vendre chèrement ma peau ? Pas tout à fait
            dans l'absolu renoncement à l'humanité sociale, mais pas
            loin.

                   Pour un SDF, les journées sont interminables, on
            n'a rien à faire et pourtant la vie dans la rue, ça use.
            Tous les gens ayant un tant soit peu de bons sens diront
            que la misère n'arrange pas la santé.

                   C'est fou ce qu'une lumière, derrière une fenêtre,
            peut évoquer de souvenir quand on est à la rue, dans le
            froid et sous la pluie. Souvent des souvenirs d'enfance
            ouateuse.


                   Il y a aussi dans le quotidien le besoin de te laver.
            Tout ça plus le froid ou la pluie te pousse à tenter ta
            chance en cherchant mieux ailleurs.

            Comment en suis-je arrivé là ? Oh tu sais ça va plus vite
            qu'on croit! Un jour, tout fout le camp. Et la force vous
            manque. La révolte, voire l'instinct de survie, meurt. On
            se trouve des raisons.
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